Je n’avais pas forcément prévu en rouvrant mon blog de ressusciter feu ma rubrique Revue du monde, et puis, je me suis rendu compte dernièrement qu’en désertant les réseaux sociaux, je commençais à accumuler un certain nombre de liens ici et là que j’avais très envie de partager. Après avoir réfléchi à un système qui me permettrait de les partager directement sur ma page d’accueil, j’ai dû renoncer, faute d’extension existante. Qu’à cela ne tienne, c’est le moment où jamais de tenter de relancer cette rubrique, la dernière revue du monde datant en effet de 2017…
Cette nouvelle revue du monde offrira donc l’occasion de revenir sur certains thèmes d’actualité, des questions environnementales aux derniers débats déchirant les sciences sociales, de parcourir des articles ou études qui m’ont interpellée, ainsi que de découvrir des parutions de livres récentes et à venir.
Comme toujours, n’hésitez pas à rebondir sur ces thèmes ou à partager en commentaire des liens qui vous ont récemment inspiré·es. Cet espace a vocation d’échange, que ce soit par la parole ou le partage, et je me réjouis toujours de vous lire.
{ environnement }
Comment les changements environnementaux font émerger de nouvelles maladies : on le sait depuis longtemps, les activités humaines influent sur le climat, modifient l’utilisation des terres et bouleversent la biodiversité. Or il s’agit là des conditions optimales pour favoriser le passage à l’être humain de micro-organismes pathogènes provenant des animaux, générant ainsi des maladies nouvelles et dangereuses.
Malgré l’expulsion de la Zad du Carnet, les opposants au béton iront « jusqu’au bout » : après plus de six mois d’occupation pour lutter contre un projet de zone industrielle du Grand Port maritime de Nantes-Saint-Nazaire, la seule zone à défendre qui résistait encore en France a été expulsée. Pour les zadistes, la mobilisation n’est pourtant pas terminée.
Pour une étude critique de la collapsologie : depuis quelques années, la théorie de l’effondrement est à la mode. Pourtant, la scientificité de ce discours est de plus en plus remise en question, et une critique semble plus que jamais nécessaire. Pour un article plus complet sur la question : La collapsologie ou la critique scientiste du capitalisme.
{ genre }
La domination scolaire des filles : un effet en trompe-l’œil : pourquoi, alors qu’elles ont de meilleures notes à l’école, redoublent moins et sont plus nombreuses dans l’enseignement supérieur que les garçons, les femmes continuent-elles d’être sous-représentées dans les carrières les plus prestigieuses et rémunératrices ? Parce que la culture scolaire délégitime leur réussite sociale.
50 ans après le Manifeste des 343, quelles causes défendre ? Le 5 avril 1971, 343 femmes acceptaient dans les colonnes du Nouvel Observateur de « s’accuser » du délit d’avortement. Cinquante ans plus tard, L’Obs publie un dossier sur le droit à l’avortement et invite treize femmes célèbres à exposer les avancées nécessaires dans la lutte féministe.
Music recommendation algorithms are unfair to female artists, but we can change that : Spotify, Deezer, Soundcloud… Sexistes, les algorithmes de recommandation musicale ? En tout cas, une chose est sûre : ils proposent plus systématiquement la musique d’artistes masculins que féminines. Une étude récente montre qu’il est possible de changer la donne.
{ sciences sociales }
« Maximiser l’objectivité et minimiser la neutralité » : du militantisme en sciences sociales : je suis toujours étonnée de voir le retard des sciences sociales françaises sur les questions d’épistémologie, alors quand en plus le gouvernement tente de faire reculer le navire en laissant croire qu’il existe un regard « neutre » en SHS (par opposition à un discours militant, non-scientifique), je m’étrangle. Un bon article d’Irène Pereira sur la question de l’objectivité scientifique.
Cartographie du surplomb : reconnue tardivement au sein des SHS françaises, le concept d’intersectionnalité suscite des résistances dans une fraction du monde universitaire. Comment expliquer ces résistances et les discours déformants dont la perspective intersectionnelle fait l’objet ? Un brillant article d’Eléonore Lépinard et Sarah Mazouz sur l’intersectionnalité et l’épistémologie du point de vue.
La fin de l’analyse de classe ? Selon certains chercheurs, les questions de race et de genre deviendraient si prépondérantes en SHS qu’elles en occulteraient les questions de classe. En s’appuyant sur une analyse textuelle quantitative des publications en sciences sociales, Abdellali Hajjat montre qu’il n’en est rien.
{ livres }
Joie militante : construire des luttes en prise avec leurs mondes
carla bergman & Nick Montgomery
À quoi ressemble la joie dans les milieux de lutte ? Qu’est-ce qui nous rend collectivement et individuellement plus capables, plus puissant·es et pourquoi, parfois, les milieux radicaux produisent tout l’inverse et nous vident de tout désir ? Combinant propositions théoriques, analyses de cas pratiques et entretiens avec des militant·es, un livre qui tente de penser différemment le militantisme et les luttes.
Editions du Commun, 290 p.
Féminispunk : le monde est notre terrain de jeu
Christine Aventin
L’histoire, souterraine et infectieuse, des petites filles qui ont choisi d’être pirates plutôt que de devenir des dames bien élevées. Une fabulation à la Fifi Brindacier et un appel à l’anticonformisme pour stimuler le « potentiel révolutionnaire des filles » et dynamiter les représentations de genre.
Zones, 136 p.
Planet on Fire: A Manifesto for the Age of Environmental Breakdown,
Mathew Lawrence & Laurie Laybourn-Langton
Alors que nous faisons face aux défis combinés du Covid-19 et du désastre écologique, comment la gauche peut-elle aller vers un monde plus viable ? Un manifeste radical pour une réimagination fondamentale de l’économie mondiale et pour une nouvelle politique capable de s’attaquer à la dégradation de l’environnement.
Verso, 288 p.
Herstory. Histoire(s) des féminismes
Marie Kirschen & Anna Wanda Gogusey
Entre pop culture et histoire sociale, un livre de vulgarisation prometteur sur la passionnante histoire du mouvement féministe.
La ville brûle, 264 p.
The Routledge Handbook of Vegan Studies
Laura Wright (dir.)
Histoire des vegan studies, engagements théoriques et géographies du véganisme… Un ouvrage collectif bien trop cher (comme toujours avec Routledge), mais dont la richesse de contenu et la diversité des points de vue sont très alléchantes.
Routledge, 444 p.
Où sont les « gens du voyage » ? Inventaire critique des aires d’accueil,
William Acker
Un travail inédit d’analyse historique, sociologique et politique du rapport entre l’État français et les communautés des gens du voyage, qui met en lumière un des grands enjeux de lutte de notre société moderne : le racisme environnemental.
Editions du Commun, 448 p.
15 comments
Une belle mine d’or d’informations cet article !
Merci Ophélie !
Je t’en prie, merci à toi !
Bonjour Ophélie,
Tu reviens en force. Merci pour tous ces liens et sujets.
Oh, merci, c’est gentil !
Une mine d’or ! As usual. Merci infiniment. Je prépare un post sur Instagram et je ne parviens pas à te tagguer, as-tu supprimé ton compte ?
Merci beaucoup ! Je l’ai désactivé. C’est-à-dire qu’il n’est pas complètement mort, mais il faut que je me log in pour le ressusciter. Et je ne sais pas encore si je vais le faire 😉
Merci pour cette revue d’articles passionnante. Pour l’instant je n’ai lu que « Cartographie du surplomb » (super éclairant, dense, à relire sans doute), mais je compte bien, petit à petit, lire le reste. Merci encore pour le travail fourni.
Merci beaucoup ! Oui, cet article est dense effectivement, très fourni, mais excellent pour comprendre les débats actuels qui traversent les SHS françaises. Si l’on ne devait lire qu’un seul texte parmi ceux que j’ai proposés, ce serait bien celui-ci !
Bonjour, est-il possible de développer l’idée que « la culture scolaire délégitime leur réussite sociale » ? Je ne comprends pas bien ce que cela veut dire.
Merci d’avance.
Selon les autrices de l’article, certaines valeurs et normes promues au sein de l’école expliqueraient la réussite scolaire des filles par leur conformisme, leur autodiscipline, leur sens de l’altruisme ; à l’inverse, si les garçons réussissent scolairement, ce serait grâce à leur confiance en soi, leur ambition et leur esprit de compétition. Dans le premier cas, chez les filles, ces explications sont souvent dévalorisées par la société (« les filles ne réussissent pas parce qu’elles sont naturellement intelligentes, mais simplement parce qu’elles sont travailleuses et font ce qu’on attend d’elles »), tandis que les compétences qu’on attribue aux garçons sont majoritairement valorisées (« les garçons sont créatifs, ambitieux et sauront tout faire pour atteindre leurs buts ») : on y voit un gage d’autonomie et d’un potentiel de réussite dans le monde du travail.
Merci beaucoup pour ce beau panorama
Un plaisir de retrouver cette rubrique 😀
Et moi de te retrouver ici ! 🙂
Le problème de la ZAD est qu’ils prennent des terrains et terres qui appartiennent à des agriculteurs et qu’ils s’y installent, sans leur accord. Tel n’est pas leur droit et ils « volent » les terres des paysans.
Au top merci,
Une bibliothécaire militante