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J’espère que mes biscuits aux épices vous ont plu ! Rien de tel, une fois le ventre plein et la faim apaisée, que de s’asseoir un peu au calme pour réfléchir… Alors, maintenant, passons aux choses sérieuses : un peu de discussion sur notre environnement…
J’imagine que vous avez déjà entendu bien des fois qu’il y a certains gestes dits ‘verts’ à adopter si l’on veut préserver la planète, stopper le changement climatique, et puis l’effet de serre, et le trou dans la couche d’ozone, et la fonte des calottes glaciaires, et… et blabla… On vous a même tellement seriné avec cela que votre sensibilisation envers la préservation de l’environnement a déjà fait un petit bonhomme de chemin. Vous faites bien attention à éteindre les lumières quand vous quittez la maison, vous ne laissez pas les fenêtres grandes ouvertes quand vous mettez du chauffage, vous veillez à ce que l’eau du robinet ne coule pas trop longtemps… Nos sociétés occidentales semblent être de plus en plus sensibles au tri et au recyclage des déchets ; les supermarchés font désormais payer leurs sacs en plastiques ; on lutte contre l’utilisation de substances nocives en cosmétique, comme les parabènes ; l’Etat impose une taxe sur l’impact carbone des voyages en avion….
Bref, tout va bien alors ?
Ces gestes, souvent qualifiés de ‘petits’, sont extrêmement importants, et je suis la première à faire attention à ne pas gaspiller de l’eau inutilement, à bien refermer l’interrupteur quand je quitte la pièce, etc. Pourtant, que fait-on vraiment ? Il est plus aisé de faire porter la responsabilité d’un problème par des individus et sur des actes relativement ‘faciles’ à effectuer et particulièrement visibles… que de poser les vraies questions.
Connaissez-vous les chiffres des dépenses énergétiques domestiques des particuliers ?
Les avez-vous déjà comparés avec ceux de l’élevage animal ?
Parce que là, l’eau du robinet qui coule pour rien, elle rigole bien dans son coin… L’élevage est en effet aujourd’hui l’un des premiers responsables des problèmes environnementaux à l’échelle mondiale. En 2006, la FAO (Food and Agriculture Organisation) publiait déjà un rapport montrant que l’élevage est responsable de 18% des émissions des gaz à effet de serre – soit d’avantage que l’ensemble des transports (13,5%). Ce chiffre d’ailleurs récemment été ré-estimé dans un rapport1 du World Watch Institute à 51% – soit plus de la moitié de la totalité des émissions anthropogéniques de CO2. Alors, comment expliquer ce poids de l’élevage sur l’environnement ?
- L’élevage utilise trop de ressources :
Surface agricole, eau, énergie… la consommation de ressources non renouvelables par l’élevage pour l’alimentation directe (viande) ou indirecte (produits laitiers, œufs) est extrêmement élevée. Il faut en effet beaucoup plus de surface agricole pour produire des protéines animales que pour produire des protéines végétales.
En terme d’énergie, la production de protéines d’origine animale – terrestres ou marines – nécessite entre 6 à 20 fois plus d’énergie fossile que les protéines de soja, selon le type d’espèce. L’élevage utilise aussi 30% de toute la surface émergée de la terre, et on continue sans cesse de défricher des forêts pour créer de nouveaux pâturages ou des terres arables destinées à la production fourragère.
Enfin, l’élevage utilise énormément de ressources en eau, et notamment en eau potable, puisqu’il représente à lui seul environ 8% de toute la consommation humaine en eau. A titre d’exemple, pour produire :
- 1 kg. de poulet = 3900 L. d’eau
- 1 kg. de fromage = 5000 L. d’eau
- 1 kg. de bœuf = 15 500 L. d’eau
- 1 kg. de soja = 1800 L. d’eau
Pour simplifier les choses, on estime qu’1 kcal végétale a besoin d’1 L. d’eau seulement, tandis qu’1kcal animale nécessite 5L. Supprimez votre tranche de steak, votre bol de lait et votre portion de camembert le temps d’une journée et faites le calcul ! La FAO a estimé qu’un Français consomme en moyenne 9000 L. d’eau par jour pour se nourri. En comparaison, un végétalien n’en utilise que 3600 L., soit une économie d’un 5400 L. d’eau ! Euh… dois-je ajouter que c’est l’équivalent d’une bonne centaine de douches ?
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- L’élevage est extrêmement polluant :
Si l’élevage participe pour le moment à plus de la moitié des rejets anthropogéniques de gaz à effet de serre, ceux-ci sont également en constante augmentation ! On a calculé que, pour que ces émissions se maintiennent à leur niveau actuel, il faudrait que chaque personne diminue sa portion journalière de viande de plus de la moitié : au lieu de 200 g. aujourd’hui, on passerait à 90 g. Il est question ici de ‘maintien’ à leur taux présent, mais qu’en conclure alors si l’on veut réellement freiner le réchauffement climatique…
Une jolie petite différence, tout de même ?..
Et cela, sans parler des autres rejets dus à l’élevage : nitrates, phosphates, ammoniac, biocides, cuivre… autant de facteurs de pollution qui sont en très grande partie issus des engrais utilisés dans la production de nourriture destinée à l’élevage, aux pesticides et désinfectants dont on a recours directement dans les produits d’origine animale, ou aux rejets (notamment les déjections) produits par les animaux eux-mêmes.
Tous ces facteurs dégradent profondément les sols – déjà sous le coup du surpâturage – de même qu’ils dégradent les eaux, dont le cycle, modifié, pèse sur l’équilibre entier de nombreux écosystèmes. L’élevage est ainsi l’une des causes majeures de détérioration de la faune et de la flore mondiale.
Enfin, il ne faut pas oublier les déchets agro-alimentaires dus à l’élevage : je ne parle pas ici des déjections animales, mais bel et bien de ce qui reste des animaux (abats, os, plumes, graisses…) qu’on ne consomme pas directement, ou de ceux qui sont jugés non nécessaires à l’industrie. En France, ce sont plus de 960 000 tonnes de farines de viande et os, de plumes et de graisses qui ne sont pas consommés et sont alors incinérés. Je ne vous fais pas un topo sur l’incinération… mais, globalement, ça ne rend pas le ciel plus bleu, n’est-ce pas ?..
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Vous comprenez maintenant combien la production de viande et de produits animaux (lait, oeufs, etc.) a un impact extrêmement important sur la santé de notre petite planète. Hélas, celui-ci est bien souvent occulté par les politiques actuelles qui préfèrent responsabiliser les individus sur des gestes symboliques, sans oser affronter les vrais problèmes (couper les subventions à l’élevage et afficher les vrais prix des denrées alimentaires n’est guère une mesure populaire…). Si vous vous souciez un tant soit peu d’environnement, alors dites-vous que le contenu de votre assiette peut réellement compter. De mon côté, entre sauciflard et douche, j’ai choisi !
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1. Cette révision est fondée sur l’inclusion de paramètres qui n’apparaissaient pas ou n’avaient pas été évalués à leur juste mesure dans le rapport de la FAO, à savoir:
– la respiration des troupeaux, source nette de CO2 : la sur-reproduction artificielle d’animaux remplace dans la plupart des cas une forêt primaire.
– les cultures fourragères et le méthane ainsi rejeté
– l’aquaculture, grande oubliée du rapport de la FAO
– et surtout, l’ensemble des impacts induits par l’élevage et la consommation d’animaux : transport de la viande, chaîne du froid, cuisson, incinération des déchets, emballages spécialisés, etc.
Sources:
Livestock’s Long Shadow – Environmental Issues and Options. Food and Agriculture Organisation. 2006
Livestock and Climate Change. World Watch Institute. 2009
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Vous avez manqué les autres parties de cette série ? Retrouvez-les ici :
25 comments
[…] le fil du blog, il n’est pas trop tard pour tenter ma soupe riche en protéines. Après les raisons environnementales justifiant d’un mode d’alimentation 100% végétal, je vais aborder maintenant des […]
[…] : – Pourquoi choisir un mode d’alimentation 100% végétal ? 1 – Introduction… – Pourquoi choisir un mode d’alimentation 100% végétal ? 2 – Pour la planète – Pourquoi choisir un mode d’alimentation 100% végétal ? 3 – Pour la santé […]
[…] Les chiffres de la soif ne sont pas moins dramatiques : plus d’un milliard d’individus n’ont pas accès à l’eau potable, et l’on estime que dans moins de quinze ans, les deux tiers de l’humanité souffriront de manque d’eau. A l’heure actuelle, l’agriculture utilise 80 % de l’eau potable sur Terre, dont l’immense majorité est utilisée, directement ou indirectement, pour les animaux d’élevage. Plus de la moitié des récoltes agricoles mondiales sert à nourrir le bétail. D’ici quarante ans, c’est la moitié de la production totale de céréales qui sera nécessaire pour l’alimentation de celui-ci. Rappelez-vous le tableau des besoins en eau publié ici… […]
[…] ne reviendrai pas ici sur les arguments éthiques, humains et environnementaux de ce choix, car j’estime les avoir déjà traités assez amplement, mais je traiterai ici […]
2.8 planètes pour ma part… J’ai encore des progrès à faire !!
On a tous des progrès à faire ! 😉
Hello,
J’ai un peu tiqué en voyant le graphe « m^2/kg de nourriture ». 17m2 pour produire un kilo de riz, ça fait un rendement de 590kg à l’hectare, alors que les rendements indiqués sur wikipédia sont plutôt de l’ordre de plusieurs tonnes à l’hectare. Il y a pas une erreur dans un coin ?
(C’est sur ce genre de points qu’une argumentation peut être attaquée, et en l’occurrence ça me désolerait parce que je la trouve juste sur le fond ^^)
Tu as raison, je vais vérifier tout ça, voir auprès de L214 (le graphique est d’eux) et modifier les choses au besoin.
Merci beaucoup !
2,2 planètes pour moi.. je pense surtout à tous ceux qui sur cette planète consomment beaucoup moins que moi et qui me permettent une vie si confortable.. j’ai honte.
En plus je n’ai pas de voiture et me déplace en transport en commun , en vélo ou à pied… mais je prends l’avion plusieurs fois par an.
Je mange peu de viande .. mais je porte de la laine et du cuir.
Je tries mes déchets ( 6 poubelles differentes à la maison !) mais qu’est ce que je jette comme emballages , plastiques, papiers, etc..!
Je crois que c’est beaucoup plus que 2,2 planètes qu’il faudrait si tout le monde consommait comme je le fais..
C’est dur de se dire que, même si nous faisons des efforts (voiture, viande, etc.), il nous faut tout de même nettement plus qu’une planète pour vivre !
Mais il faut se dire que, en agissant comme nous le faisons déjà et en n’ayant de cesse de nous améliorer, nous entraînons d’autres gens et d’autres pensées avec nous, pour le plus grand bien de notre planète ! Ne nous décourageons pas et avançons !
ah ça non, on ne se décourage pas ! De toute façon , une fois que l’on adopte les gestes plus respectueux qui visent à préserver nos ressources naturelles, on ne peut plus revenir en arrière. Ces gestes deviennent des automatismes et nous les transmettons à nos enfants. demain sera meilleur!
Je trouve que ce test est complètement trompeur et biaisé. Par exemple, ils partent du principe que tout le monde chauffe sa maison. Or de plus en plus de gens ne le font pas, non pas par souci écologique (ou pas seulement), mais par manque de moyens (chez nous il fait entre 15 et 17° l’hiver selon la rigueur de la saison). Idem pour les poubelles, l’option la plus faible est moins de deux poubelles par semaine, alors que quand on a un compost et qu’on consomme peu d’emballages, c’est plutôt une poubelle toutes les deux ou trois semaines. Idem pour la composition des logements qui me semblent très surdimensionnés (et on ne sait pas trop ce qu’ils mettent dans « autre »). Etc.
J’ai fait le test en mettant à chaque fois les valeurs les plus faibles, et on arrive quand même à 1,8 planètes – ce qui semble être donc, de leur point de vue, le minimum possible simplement en vivant en Europe. Mouais.
Je suis d’accord avec toi, Lucie, et je comprends que tu ne sois pas contente que tu ce que tu fais ne puisse pas être pris en compte et estimé à sa juste valeur. J’ai été aussi un peu déçue, comme dans d’autres tests où on nous colle toujours des produits animaux à manger, même si l’on déclare ne jamais en manger : du coup, ça fausse les résultats…
Mais bon, si ça peut aider les gens qui ne font guère attention à l’environnement à se rendre compte qu’il faut changer leur mode de vie, alors je trouve que ce n’est pas si mal ! 😉
je suis aussi d’accord. Ces tests ne sont pas toujours représentatifs de nos consommations individuelles, mais ne nous ne vivons pas seuls dans notre coin. effectivement en vivant en Europe nous vivons dans des espaces publics aussi consommateurs d’énergie ( éclairages nocturnes, etc..), de biens ( papier par exemple ) et autres . C’est notre communauté toute entière qui dépense trop , qui gaspille, qui consomme au delà des ressources et des besoins naturels. Qu’on le veuille ou non, chacun d’entre nous prend à sa charge le mode de consommation d’une société entière.
et même si ils sont faussés ces tests permettent à beaucoup de gens de prendre conscience que notre mode de vie n’est pas possible sur le moyen terme.
Bonjour Ophélie, ça y est, je me suis lancée dans la lecture de ton blog depuis ses débuts. Un grand merci pour tes superbes articles, très bien écrits, complets et surtout accessibles. Grâce à eux, j’ai maintenant plus d’arguments à présenter à mes détracteurs autant qu’à ceux qui s’intéressent au véganisme. Une petite question : dans cet article, tu parles d’un test d’empreinte carbonique mais impossible de trouver le lien sur lequel cliquer pour y accéder. Est-ce que je manques quelque chose ou bien le lien a-t-il disparu ?
Bonne semaine.
Ah, c’est bizarre, la page-mère a dû être supprimée ou son lien a dû changer, j’irai voir pour rétablir cela ! 🙂
[…] produits laitiers, on l’a vu, c’est has been ! Souffrance animale, danger pour la santé, impact écologique… Bref, pas besoin d’en rajouter, on le sait : mieux vaut s’en […]
Merci Ophélie pour cet article qui permet de pouvoir contre-attaquer contre les articles un peu douteux qui circulent en ce moment sur le web. Il est toujours bon de pouvoir lire des articles comme les tiens, bien structurés et argumentés 🙂
Bonjour antigone! Merci pr ton site très enrichissant; il est une grande source d’inspiration pour moi. Mais un point me dérange : En lisant tes recettes, je suis a chaque fois très surprise par le nombre d’ingrédients qu’il y a dans chaque recette et qui pr la plus part viennent de l’autre côté du globe… Donc vegan écologique oui et non si on tient compte de l’empreinte carbonique liée a leur acheminement, pourquoi acheter du sirop d’érable alors qu’on a tous un apiculteur par exemple près de chez nous?
[…] du site de Cowspiracy. Je vous conseille aussi l’excellente série intitulée « Pourquoi végane? » du blog d’Antigone XXI, qui passe en revue les aspects importants: la planète, les […]
[…] que cet autre article de Antigone […]
[…] produits laitiers, on l’a vu, c’est has been ! Souffrance animale, danger pour la santé,impact écologique… Bref, pas besoin d’en rajouter, on le sait : mieux vaut s’en passer. Je vous avais montré […]
Pour tout ce qui touche aux ressources nécessaires à l’élevage animalier, nous l’avons étudié l’an dernier (programme de 1ère L / ES) en SVT et Physique. D’ailleurs je suis tombée sur ce sujet au Bac, alors ce dont tu parles dans ton article ne m’est pas totalement inconnu. Au final ça ne m’étonne pas plus que ça que le sujet de la viande et de l’élevage soit à peine abordé dans le domaine écologie parce que « uiiii mais manger de la viande c’est normal, ne faisons pas de polémique pour diviser les frââânçais ». Et ça vient de quelqu’un qui mange encore de la viande ; c’est juste que je me pose de plus en plus de questions quant à mon régime omnivore, notamment lorsqu’on me met de telles statistiques et questions éthiques sous le nez.
Bonjour Antigone, j’aime beaucoup les visuels et les graphiques dans cet article, est-ce que tu aurais un lien où je peux les trouver en anglais (si ça existe)? Merci beaucoup pour cet article super enrichissant!
[…] ces trois dimensions, je vous recommande ces billets du blog Antigone XXI : ici, là et là. Je compte aborder cette question sous l’angle de la santé. En effet, sur cet aspect […]