Ceci n’est pas de la végéphobie

by Antigone XXI

Ce week-end avait lieu la Veggie Pride à Paris. Un événement militant dont l’un des principaux objectifs est de lutter contre le spécisme. Un événement que je soutiendrais pleinement si son autre objectif avancé et, par ailleurs, sa raison d’être originelle n’étaient pas de combattre la « végéphobie ». La végéphobie, ou « l’oppression contre les personnes végétariennes ou véganes ». D’où le nom de « Pride », qui reprend le nom des grandes marches organisées par le mouvement LGBT (type Gay Pride, Lesbian & Gay Pride ou LGBT Pride) et destinées à offrir de la visibilité aux personnes homosexuelles, bi, trans ou queer. « Pride », pour « affirmer notre fierté de refuser de faire tuer des animaux pour notre consommation », peut-on lire dans l’un des manifestes de la Veggie Pride (annexe 1).

Comme chaque année, l’utilisation des termes « pride » et « végéphobie » n’a pas manqué de susciter la polémique. Comme chaque année en effet, de nombreuses personnes LGBT ont manifesté leur mécontentement devant le parallèle fait entre leurs marches et celles des véganes, entre les oppressions dont elles sont victimes et celles dont les véganes seraient victimes. Comme chaque année encore, partisan·e·s et détracteur·rice·s de l’événement ont débattu sur les réseaux sociaux, les premier·ère·s criant à la végéphobie à chaque tweet dénonçant la victimisation des véganes. Comme chaque année enfin, de nombreuses personnes, LGBT ou non, véganes ou non, sont restées amères face à ce refus affiché de questionner le caractère problématique du parallèle entre la végéphobie et les autres « phobies ».

Que faut-il en penser ? Est-il problématique de parler de « végéphobie » et d’emprunter à d’autres luttes sociales leur vocabulaire militant ? A l’heure où les revendications du mouvement animaliste gagnent du terrain et que le véganisme semble en plein essor dans notre société, il est important de bien cerner les enjeux qui se cachent derrière cette controverse.

Le mot « végéphobie » est calqué sur des termes faisant référence à des réactions de rejet de la différence. On parle notamment d’islamophobie, de xénophobie, de judéophobie, d’homophobie ou de transphobie pour parler du mépris, du rejet ou de la haine envers des personnes musulmanes, étrangères, juives, homosexuelles ou transidentitaires[1]. Le site de la Veggie Pride renvoie d’ailleurs à un livret (68 pages, quand même !) qui définit d’emblée la végéphobie à partir de l’homophobie.

Bien que le suffixe -phobie désigne étymologiquement un phénomène de peur irrationnelle (comme l’arachnophobie, la peur des araignées), son sens a peu à peu dévié pour décrire également le sentiment d’aversion à l’égard des personnes issues des communautés visées, ainsi que les manifestations de cette aversion. Les personnes concernées peuvent être victimes de violence verbale, morale ou physique, se traduisant notamment par des insultes, des agressions et même des meurtres. S’y ajoutent de nombreuses formes de discrimination, qui peuvent ou non être institutionnelles. Il s’agit, en d’autres termes, des expressions symboliques, physiques ou psychiques d’une oppression systémique à l’égard de certains individus ou groupes d’individus. D’ailleurs, c’est ce caractère politique du concept que souligne le livret sur la végéphobie, plutôt que ses attaches psychologiques.

Une oppression systémique, qu’est-ce que c’est ? Ce terme désigne la (re)production et le renforcement des inégalités et discriminations subies par certains groupes ou individus par le système politique, économique et social. Il s’agit donc d’une oppression exercée par un système. Les oppressions s’appuient sur les privilèges dont bénéficie un groupe de personnes partageant une caractéristique considérée comme « normale », voire « supérieure ». Si ces oppressions sont dites « systémiques », c’est parce qu’elles sont intrinsèquement liées au fonctionnement de notre société. Le patriarcat, par exemple, est une organisation sociale et juridique fondée sur la détention de l’autorité des hommes et qui a pour conséquence le sexisme.

Prenons le cas de l’homophobie. En France, les relations homosexuelles ont été interdites par la loi jusqu’à la fin du XVIIIsiècle. Elles n’ont été dépénalisées qu’en 1791, même si le régime de Vichy instaura une loi discriminant les homosexuel·le·s, qui ne sera abrogée qu’en 1982. Pendant très longtemps, toute manifestation publique de l’homosexualité a été réprimée sous couvert d' »outrage public à la pudeur ». Dans un certain nombre de pays, l’homosexualité est interdite par la loi et les actes homosexuels sont passibles de peine de mort. En France, le droit à l’adoption pour des couples de même sexe n’a été instauré qu’en 2013. Les personnes homosexuelles sont souvent victimes de discrimination dans leur recherche d’emploi ou de logement, et font l’objet de fréquentes agressions dans l’espace public. Elles peuvent être victimes de violence physique, de viols ou de crimes de haine.

Les personnes transidentitaires sont, de la même manière, discriminées de multiples manières, notamment dans l’accès aux traitements médicaux. Ce n’est qu’en 2010 que la transidentité a cessé d’être considérée comme une maladie mentale en France. Dans de nombreux pays, il est impossible de modifier le sexe sur les dossiers de naissance ou documents d’identité. Dans une étude américaine portant sur les personnes transgenres, près de la moitié des personnes interviewées déclaraient ne pas avoir d’emploi en raison de leur transidentité, plus d’un tiers des femmes trans rapportaient avoir perdu leur emploi pour cette raison et plus de la moitié des personnes questionnées rapportaient avoir été harcelées sur leur lieu de travail. Selon une autre étude américaine récente, 46% des hommes trans et 42% des femmes trans aux Etats-Unis ont d’ailleurs déjà fait une tentative de suicide – un chiffre dix fois plus élevé que la moyenne nationale.

 

Au regard de ces définitions et des manifestations que prend le rejet à l’égard de certaines communautés, il semble difficile de parler de « végéphobie » pour caractériser les vexations, moqueries, rejets ou formes de discrimination dont peuvent être victimes les véganes.

Les cas de violence physique à leur égard sont rarissimes et je n’ai jamais entendu parler de personnes physiquement agressées ou tuées en raison de leur végétarisme ou véganisme, même s’il faut néanmoins reconnaître quelques – rares, mais dramatiques – cas de véganes s’étant donné la mort en réponse au harcèlement dont iels étaient victimes. Du reste, les véganes ne sont pas passibles de peines de prison ou de peine de mort et les cas de discrimination dans leur recherche d’emploi ou de logement sont peu communs.

Notons ici une différence fondamentale : si l’homosexualité ou la transidentité ne peuvent être qualifiées de choix, à l’inverse, devenir végane est un choix assumé. Il s’agit d’un engagement philosophique et politique, comme peuvent l’être par ailleurs le pacifisme ou l’antiracisme. Depuis quand parle-t-on d’ailleurs de « pacifismophobie » ou d' »antiracismophobie » ?

Par ailleurs, entre la végéphobie et les autres formes de « phobie », la différence ne se mesure pas tant en termes de degré que de nature. S’il est problématique de faire un parallèle entre l’oppression dont sont victimes les personnes musulmanes, étrangères, juives, homosexuelles ou transidentitaires et celles dont sont victimes les végétarien·ne·s et les véganes, c’est parce que, dans le premier cas, il s’agit d’une oppression systémique, mais pas dans le second. Au-delà de l’indécence de la comparaison, il s’agit ici d’une erreur d’analyse : s’il existe bel et bien une oppression systémique à l’égard des animaux non-humains, il n’existe pas d’oppression systémique à l’égard de celles et ceux qui en défendent les droits.

 

Source : Insolente Veggie

 

En revanche, on peut tout à fait reconnaître les vexations dont peuvent souffrir les personnes végétariennes et véganes. Ces dernières sont fréquemment l’objet de moqueries de la part de non-véganes et peuvent avoir des relations difficiles avec leur entourage (à distinguer toutefois du rejet dont peuvent être victimes les personnes homosexuelles ou transidentitaires, parfois mises à la porte de leur propre maison ou désavouées par leur famille).

On peut parler de discrimination dans certains cas : en France, par exemple, la législation ne permet pas aux personnes véganes de manger comme elles l’entendent dans les collectivités publiques. En particulier, depuis le décret et l’arrêté de 2011, les repas servis dans les écoles publiques doivent toujours contenir des protéines animales[2]. On recense également plusieurs cas de retraits de la garde ou de placements des enfants issu·e·s de familles végétariennes ou véganes, comme le cas du petit Joachim : notons ici que si le végétarisme ou véganisme des parents ou de l’enfant n’a jamais été la cause unique ou déclarée de ces retraits ou placements, il semble clair que ceux-ci n’auraient pas eu lieu si les parents ou l’enfant n’avaient pas été véganes. On touche d’ailleurs ici à une autre forme de discrimination : les végétarien·ne·s et les véganes peuvent se voir refuser des soins médicaux. En effet, les médecins manquent souvent d’informations pour traiter leurs patient·e·s véganes ; iels peuvent imputer le moindre problème de santé à l’alimentation de celleux-ci, occultant alors les vraies causes de ces problèmes ; dans certains cas, iels peuvent même refuser de les soigner. Enfin, on dénote des formes de discrimination au travail, puisque les véganes peuvent être contraint·e·s à des pratiques contraires à leur convictions morales (par exemple, des personnes contraintes à porter des vêtements en cuir ou laine, à disséquer des animaux, etc.).

S’il est donc possible de parler de discriminations à l’encontre des végétarien·ne·s et, plus particulièrement, des véganes, il paraît difficile en revanche de parler de végéphobie au sens d’une oppression systémique. Il ne s’agit pas, en reconnaissant cela, de minimiser les souffrances et les traitements différentiels dont peuvent être victimes les véganes, mais simplement de les replacer dans leur contexte social.

Les partisan·e·s du terme de végéphobie sont les premier·ère·s à le reconnaître : « ce n’est pas dans le seul but de montrer à quel point nous, les végétariens, nous sommes discriminés. C’est bien pour montrer à quel point les animaux sont discriminés, même à travers nous » (livret sur la végéphobie, p. 7). Pourtant, cette affirmation n’est pas sans poser problème. Pourquoi ? Tout simplement parce que nous ne sommes pas les animaux. Nous parlons au nom des victimes du spécisme, pas en notre propre nom. Nous ne sommes pas les concerné·e·s de la lutte animale : nous n’en resterons toujours que les allié·e·s.

Alors, quand je lis une phrase comme celle-ci, je manque de m’étrangler : « Les animaux sont considérés comme inférieurs aux humains. En affichant notre solidarité avec eux, nous endossons cette infériorité, nous sommes dans une certaine mesure méprisés et marginalisés. Comme si, parce que nous disons que notre espèce n’a pas tous les droits, nous nous retrouvions déchus des privilèges que nous avions en naissant humains » (livret sur la végéphobie, p. 8). Honnêtement, on se penche un peu sur les 60 milliards d’animaux terrestres et deux mille milliards d’animaux marins qui sont tués chaque année et on reparle de nos privilèges humains déchus ? Désolé, mais je crois que ne pas pouvoir se servir de dessert à la cantine, ce n’est pas tout à fait la même chose.

Il y a donc ici comme une double indécence : d’abord, celle à l’égard des groupes humains opprimés, quand nous revendiquons un parallèle entre notre soi-disant « oppression » en tant que végés et la leur ; ensuite, celle due à l’identification qui est faite entre le sort des animaux non-humains et notre propre sort. A lire les justifications empressées des partisan·e·s de la « végéphobie », je ne peux m’empêcher de songer à la concurrence victimaire. C’est à qui sera lae plus opprimé·e, lae moins privilégié·e. J’ai parfois l’impression d’une bande de petits mecs blancs cis et hétéros qui a du mal à reconnaître ses propres privilèges et cherche à tout prix à s’inventer des oppressions.

Cela ne veut pas dire, bien entendu, qu’il soit simple d’être végane dans une société dominée par le carnisme. Les véganes sont en droit de dénoncer les moqueries, vexations et discriminations dont iels sont victimes, car celles-ci contribuent au manque d’attractivité du mouvement. Beaucoup de gens n’osent en effet pas défendre publiquement la cause animale en raison des difficultés sociales liées à une alimentation sans produits animaux, ou parce que celle-ci est associée à des stéréotypes négatifs, comme l’excès de « sensiblerie ». La dépression des activistes est également un phénomène bien réel qu’il faut prendre au sérieux. Il ne s’agit donc pas de minimiser ou taire ces souffrances. Pourtant, les personnes véganes LGBT sont souvent les premières à le reconnaître : les vexations qu’elles subissent en raison de leur véganisme n’ont rien à voir avec ce qu’elles subissent en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identification de genre.

 

Source : T-Punch Insurrectionnel

 

Si le mouvement animaliste continue à crier à la végéphobie, il risque bien de se voir confronté à un problème de légitimité et de crédibilité. Comment revendiquer une appartenance à la sphère des mouvements de justice sociale si l’on passe son temps à ne pas écouter la parole des victimes d’injustice sociale ? Quand les personnes LGBT nous disent qu’il est problématique de parler de « végéphobie » comme de « veggie pride », pourquoi nous montrons-nous insensibles à leur ressenti ? Pourquoi ne pas comprendre que la récupération des oppressions est problématique ?

Dans la littérature sur les mouvements sociaux, le mouvement animaliste est généralement décrit comme un « mouvement à enjeu unique ». Cela a des conséquences importantes. En particulier, dans la plupart des mouvements sociaux, les militant·e·s s’engagent en faveur d’une cause par effet de réseaux et de capillarité (par exemple, on devient féministe parce qu’on s’était engagé·e dans un mouvement anti-raciste et qu’on y a été sensibilisé·e à l’intersectionnalité ou vice-versa). A l’inverse, la majorité des militant·e·s animalistes s’engagent en faveur de cette cause de manière isolée, souvent à la suite d’un « choc moral » (en particulier, le spectacle de la cruauté envers les animaux), et ce, sans aucune connaissance ni expérience préalable des autres mouvements sociaux. Selon les sociologues Jasper et Nelkin, c’est ce qui explique d’ailleurs pourquoi le mouvement animaliste ne parvient pas à créer des relations stratégiques avec les autres mouvements sociaux. Dans leur livre, The Animal Rights Crusade, iels suggèrent que le sentiment d’urgence partagé par bien des activistes animalistes, associé à une certaine « naïveté politique », a pour conséquence l’existence d’attitudes offensantes à l’égard d’autres mouvements et l’échec d’alliances avec ceux-ci[3].

Car c’est bien là que réside le problème : tant que les véganes crieront à la végéphobie et pleureront leurs vegan tears, le mouvement restera associé à l’image qui lui colle à la peau : un mouvement privilégié, non-safe et non-inclusif, constitué pour l’essentiel de personnes blanches, cisgenres, hétérosexuées, appartenant à des classes sociales aisées et intellectualisées, qui n’ont aucune conscience de leurs privilèges et méprisent les véritables victimes d’oppression. Au niveau stratégique, il y a mieux. S’isoler ainsi des autres mouvements, c’est perdre en popularité et en attractivité potentielles. C’est aussi courir le risque de pas voir le mouvement animaliste croître suffisamment pour voir ses revendications prises en compte.

Bien sûr, je n’écris pas tout cela pour clouer la Veggie Pride au pilori. J’apprécie profondément son équipe organisatrice et je pense qu’il s’agirait d’un magnifique événement, festif et stimulant, si elle reconnaissait publiquement le problème lié à l’utilisation de termes et concepts dérivés d’autres oppressions. J’admets également qu’il est difficile, dans un premier temps, de reconnaître le caractère offensant de certains propos ou certaines pratiques. C’est d’ailleurs là l’essence-même d’une positionnalité privilégiée : habitué·e·s que nous sommes à nos propres privilèges et n’ayant jamais fait l’expérience de l’autre côté du miroir, nous avons du mal à les identifier. Moi-même ai-je participé à la Veggie Pride il y a deux ans, sans penser une seule fois alors que ce terme pouvait être problématique. J’ai par ailleurs longtemps utilisé le terme de « coming-out » pour décrire l’annonce de mon véganisme à mes proches et ai même défendu à quelques reprises ce terme face à des personnes qui s’offensaient de l’emprunt au vocabulaire LGBT, comparant implicitement la nature de mon vécu et la violence de mon expérience à celles des LGBT (j’ai honte).

Bref, tout cela pour dire qu’il est acceptable, pardonnable d’être dans l’erreur. Ce qui l’est moins, en revanche, c’est de couper court à tout dialogue et de se murer dans une position donnée, même si cette stratégie défensive est malheureusement courante. La Veggie Pride a elle-même évolué ces dernières années : les débats internes sur la question ne manquent pas, la dénonciation de la végéphobie a été mise au second plan par rapport à la défense de l’antispécisme et l’appellation de « festival antispéciste » a vu le jour. Tout ceci est très positif. Mais il s’agit désormais de passer à l’étape supérieure : désavouer le concept de « végéphobie », accepter de façon ouverte les critiques des personnes concernées et changer le nom de la Veggie Pride. Un simple « Veggie Parade » pourrait sans doute faire l’affaire et ne marquerait pas un grand changement en termes d’habitude et de visibilité.

Au-delà de l’exemple de la Veggie Pride, nous autres, véganes, militant·e·s animalistes, n’avons rien à gagner à nous victimiser et nous faire passer pour ce que nous ne sommes pas. En termes de réflexion, cela peut nous induire en erreur ; en termes stratégiques, c’est contre-productif. A nous conforter dans cette stratégie victimaire, nous risquons de nous mettre à dos la plupart de nos allié·e·s potentiel·le·s. Cessons de vouloir toujours nous identifier aux mouvements dont les membres luttent pour leurs propres droits, de nous approprier leur langage, de récupérer leurs oppressions. Reconnaissons et acceptons le statut particulier du mouvement animaliste, un mouvement allié qui tente de représenter les droits des concerné·e·s. Nous qui nous targuons trop souvent de « parler à la place » des concerné·e·s, nous ferions bien de prêter un peu plus l’oreille à la parole de tout·e·s les concerné·e·s. Nous ne pouvons défendre les animaux en nous asseyant continuellement sur les êtres humains.

 

 

Source image de couverture : OLE SPATA/DPA/AFP

[1] D’autres groupes sociaux sont également l’objet de phobies. Je reconnais leur existence mais ne peux tous les citer ici.

[2] Décret n° 2011-1227 et arrêté du 30 septembre 2011 relatifs à la qualité nutritionnelle des repas servis dans le cadre de la restauration scolaire, Légifrance.

[3] Jasper, J.M. et Nelkin, D. (1992), The Animal Rights Crusade: The Growth of a Moral Protest. New York : Free Press.

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112 comments

SophroMum 11 octobre 2017 - 10 h 48 min

Wow article passionnant !!! Voilà un sujet qui ne m’aurait jamais traversé l’esprit mais tellement bien expliqué ! Merci 🙂

Elisabeth 11 octobre 2017 - 10 h 58 min

Bonjour,
Juste un petit mot pour dire que les choses évoluent quand même :
Mon grand-père (dans les années 80) était végétarien, mais a dû arrêter ce régime quand il est rentré en maison de retraite. Il n’avait pas le choix.
Aujourd’hui, ma mère est rentrée en maison de retraite en Centre Bretagne. Elle a demandé des menus végétariens et ça lui a été accordé (tout en sachant que le cuisinier n’est pas formé et que les menus ne sont du coup pas très équilibrés, mais il faut saluer son effort).
Bonne journée.
Elisabeth

Gwen 11 octobre 2017 - 11 h 07 min

Oui je suis vraiment d’accord sur le problème de l’appellation. Cependant, quand j’y suis, je trouve qu’on parle plus d’antispécisme, sur le stands, entre militants, durant les conférences, même durant la marche les slogans sont plus de cette nature. Du coup, c’est vrai que j’en avais presque oublié le nom et ça ne m’avait pas choqué jusque-là (ni mes amies lesbiennes d’ailleurs avec qui je vais en discuter je pense). Effectivement, un changement de nom serait préférable ainsi qu’une réorientation pour se concentrer pleinement sur les animaux.

Nicolas Louis 11 octobre 2017 - 11 h 26 min

Ayant participé à la Veggie Pride cette année, je ne m’étais pas encore penché sur le sujet du « Pourquoi le nom de Veggie Pride pose problème et est assez critiqué ». Cet article l’explique très bien. Merci beaucoup.

Échos verts ❀ Natasha 11 octobre 2017 - 11 h 26 min

Tes propos sont plein de bon sens, comme toujours, et je trouve que de manière plus globale, il pousse à réfléchir à l’usage de nombreux mots que l’on s’approprie et que l’on utilise à tout-va sans en connaître le véritable sens ou sans se poser de questions (personnellement, chaque année je dois expliquer à plusieurs de mes nouveaux·elles élèves d’anthropologie pourquoi le mot « race » est complètement inapproprié pour décrire différents groupes humains…).

laure 11 octobre 2017 - 11 h 26 min

Très intéressant cet article, et hyper fouillé comme toujours, merci c’est passionnant.

Amélie 11 octobre 2017 - 11 h 32 min

Article ô combien intelligent, et une belle bouffée d’air frais… merci!

L’analyse du groupe source qui emprunte, sans réaliser le choquant de la chose, le vocabulaire de groupes subissant au quotidien de réelles et graves discriminations est particulièrement pertinente… Évidemment, sans avoir vécu cette violence sous-jacente soi-même, se voir soudain moqué.e, ridiculisé.e, est très pénible. Mais la nature de ce rejet est effectivement tout autre que les « vraies » -phobies.
Je nuancerais juste un petit point: il me semble (impression tout à fait empirique) que la majorité des végéta*ien.nes/véganes sont des femmes, qui ont bel et bien un vécu d’oppression systémique.

Reste que cette impression, parfois, d' »oppression olympics », conjuguée à de la morgue agressive chez certain.e.s véganes, nuit à notre cause, je pense. Nous nous battons pour la cause animale, et braquer les autres, les détournant du véganisme au passage, est tout à fait contre-productif.

J’ajouterais que la prise de conscience de la réalité de l’exploitation animale peut aussi ouvrir les yeux sur d’autres formes d’exploitation – je voyais encore ce matin à quel point le dépliant de mon supermarché bio mettait en avant des produits végétariens/véganes labellisés « fair trade »… il y a de l’espoir!

marie 11 octobre 2017 - 11 h 36 min

j’adhère à 200%. c’est d’ailleurs pour cela, que végé isolée dans mon coin, je ne suis pas  » militante ». Je ne connais pas d’autres végés autour de moi (si ce n’est ma nièce qui est devenue végétarienne depuis le début de l’année). Je fais ch*** personne, surtout mes amis de AIDES, et de plus en plus de gens comprennent et commencent à réfléchir à leur consommation. Je crois que quand on n’a pas la plume, le verbe réfléchi comme toi, il vaut mieux se retenir. La « petite formule » choc est rarement pertinente.
si je puis me permettre la formulation « j’ai envie de m’étrangler » est maladroite, « je manque de m’étrangler » me paraît plus adaptée.

Pauline 11 octobre 2017 - 11 h 45 min

Merci pour cet article, il est parfait. ♥

DAKHLAOUI Yousra 11 octobre 2017 - 11 h 58 min

Un article qui fait avancer les réflexions! Merci c’est un très bon article!

sarahetcetera2016 11 octobre 2017 - 12 h 08 min

Merci beaucoup pour cet article très clair qui remet bien les choses à leur place (:

L'Akène 11 octobre 2017 - 12 h 16 min

Merci pour l’article ! Heureusement, il me semble que la très grande majorité des VG sont de cet avis … 🙂

isabelle 11 octobre 2017 - 12 h 21 min

article bien argumenté . On voit que son auteure a fait des études universitaires et manie bien la rigueur intellectuelle et la logique! isabelle

fredericmesguich 11 octobre 2017 - 12 h 47 min

Quelle est la différence entre des discriminations systémiques (état, emploi, médias…) et interpersonnelles, poussant parfois au suicide*, et une oppression ? J’ai l’impression qu’on donne tous les éléments nécessaires à définir une oppression en concluant l’inverse.

Pour rappel, le terme sexisme est calqué sur le terme racisme http://www.cnrtl.fr/definition/sexisme
Du coup il faut lutter contre l’emploi du terme parce qu’on risque de confondre analogie et équivalence ?

Un autre article sur la question: http://lesquestionscomposent.fr/vegephobie/

* j’ai mal à ma source https://www.closermag.fr/vecu/faits-divers/harcele-pousse-a-bout-parce-qu-il-est-vegan-un-adolescent-se-suicide-750556

La Nébuleuse 11 octobre 2017 - 12 h 48 min

Ah MERCI pour cet article vraiment, il synthétise tellement bien les choses ! « Depuis quand parle-t-on d’ailleurs de “pacifismophobie” ou d’”antiracismophobie” ? –> c’est souvent ce que je réponds en prenant comme exemple la difficulté d’avoir des opinions politiques différentes dans certaines familles… je ne vais pas me plaindre pour autant de « gauchophobie » ! C’est aussi toute la difficulté des enjeux lexicaux, un peu comme pour le racisme, on a tôt fait de défendre l’usage d’un terme en s’arrêtant à une définition un peu simple du dico sans prendre en compte tout l’héritage historique, l’enjeu politique, les connotations etc. Et sinon j’ai justement reçu récemment The Animals rights crusade, j’espère le lire prochainement, vu que c’est précisément des thématiques sur lesquelles j’aimerais travailler

woli 11 octobre 2017 - 12 h 55 min

Merci, lire une vegan nuancée et intelligente me change un peu !

Cependant, sans vouloir me faire caillasser, je pense au contraire que le fait que le veganisme soit marginalisé, rejeté par la majorité « pensée unique » amène bien plus de jeunes gens à votre cause par esprit de contradiction qu’il ne leur fait peur…

Vlavvy 11 octobre 2017 - 14 h 46 min

« lire une vegan nuancée et intelligente me change un peu ! »
Je ne voudrais pas faire mon relou, mais cette phrase en dit déjà long sur le sujet.

Darwini 11 octobre 2017 - 20 h 03 min

« lire une vegan nuancée et intelligente me change un peu ! »

Cette phrase me semble ni nuancé ni intelligente!

Emily 11 octobre 2017 - 13 h 30 min

Bravo pour cet article !

fredericmesguich 11 octobre 2017 - 14 h 30 min

« je n’ai jamais entendu parler de personnes physiquement agressées ou tuées en raison de leur végétarisme »
Aucune définition d’une oppression ne tient compte de l’intensité. Sinon qu’un acte soit oppressif ou non dépendrait seulement du système dans lequel on le prend en compte (famille, ville, état, monde). On est victime d’une oppression même lorsque celle-ci n’entraine pas d’agression physique.

« Notons ici une différence fondamentale : si l’homosexualité ou la transidentité ne peuvent être qualifiées de choix, à l’inverse, devenir végane est un choix assumé. »
Aucune conséquence sur la définition de la végéphobie comme oppression puisqu’il existe des oppressions politique ou religieuses.

« Au-delà de l’indécence de la comparaison »
Il devrait être interdit de comparer des choses car cette réflexion est indécente. Bel aveu de parti pris.

« il n’existe pas d’oppression systémique à l’égard de celles et ceux qui en défendent les droits »
Pétition de principe

« il paraît difficile en revanche de parler de végéphobie au sens d’une oppression systémique »
Même pétition de principe, toujours sans aucun argument pour appuyer cette affirmation, et même après avoir donné de sérieux contre-arguments.

« Les partisan·e·s du terme de végéphobie sont les premier·ère·s à le reconnaître »
Généralité abusive permettant un homme de paille.

« Désolé, mais je crois que ne pas pouvoir se servir de dessert à la cantine, ce n’est pas tout à fait la même chose. »
Confusion entre comparaison et équivalence. Les propos rapportés entre guillemets sont pourtant très nuancés.

« Il y a donc ici comme une double indécence »
Encore cette même interdiction morale à la réflexion. Toujours non argumentée.

« l’identification qui est faite entre le sort des animaux non-humains et notre propre sort.  »
Confusion très claire entre comparaison et équivalence.

« je ne peux m’empêcher de songer à la concurrence victimaire. C’est à qui sera lae plus opprimé·e, lae moins privilégié·e. J’ai parfois l’impression d’une bande de petits mecs blancs cis et hétéros qui a du mal à reconnaître ses propres privilèges et cherche à tout prix à s’inventer des oppressions. »
Homme de paille couplé à un procès d’intention.

« les vexations qu’elles subissent en raison de leur véganisme n’a rien à voir avec ce qu’elles subissent en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identification de genre. »
Il suffit d’un seul contre-exemple pour montrer que cette phrase est fausse. Il suffit de piocher dans ce même texte: « objet de moqueries de la part de non-*** » ; « peuvent avoir des relations difficiles avec leur entourage »…

« Comment revendiquer une appartenance à la sphère des mouvements de justice sociale si l’on passe son temps à ne pas écouter la parole des victimes d’injustice sociale »
Une bien bonne autocritique. Laissez la parole aux victimes plutôt que de leur nier le droit de nommer ce qu’elles subissent.

« Quand les personnes LGBT nous disent qu’il est problématique de parler de “végéphobie” comme de “veggie pride”, pourquoi nous montrons-nous insensibles à leur ressenti ? »
Généralité abusive qui contient en elle même sa réfutation.

« Pourquoi ne pas comprendre que la récupération des oppressions est problématique ? »
Pour rappel, le terme sexisme est calqué sur le terme racisme http://www.cnrtl.fr/definition/sexisme Ce qui n’empêche pas de voir une question un poil orientée.

« A l’inverse, la majorité des militant·e·s animalistes s’engagent en faveur de cette cause de manière isolée »
Affirmation non sourcée. Des indices de son inexactitude via les sites et revendications de l’AVF ou de L214 mettant aussi en avant les justices environnementales, économiques, et les très nombreux textes, groupes militants et individus prônant l’intersectionnalité des luttes animalistes, antiracistes, anticapitalistes ou antipatriarcales.

« tant que les véganes crieront à la végéphobie et pleureront leurs vegan tears »
La faute est portée sur la victime.

Ccl: J’ai l’impression qu’on donne tous les éléments nécessaires à définir une oppression en concluant l’inverse. Sous convert « d’indécence » on coupe court à tout dialogue et on se mure dans une position donnée sans aucun argument. De plus, ce texte renforce les confusions des non concerné·e·s et renforce donc leur sentiment à l’encontre d’un mouvement qui leur est allié.

Nicolas Servant 11 octobre 2017 - 23 h 23 min

Bonjour Ophélie, tu as oublié de parler des enfants qui font ce choix et qui reçoivent en retour raillerie et pressions psychologiques à chaque repas dans la famille de manière répétée presque harcelante et on ne peut pas y échapper.
Mais aussi à l’école qui verse dans la même contrainte à ré-orienter le choix de l’enfant et cela à chaque repas, chaque jours durant une éternité quand on est enfant.

Donc au moins pour l’âge de l’enfance il serait bien de revoir ce jugement, non ?

Il est vrai que peu d’études existent sur les conséquences éducatives et psychologiques de cela.
Il y a tout de même un billet de l’association des psy de l’éducation nationale. https://www.afpen.fr/L-EMPATHIE-A-L-EPREUVE-DU-SPECISME.html

Raquel 12 octobre 2017 - 21 h 03 min

Je suis d’accord. Les pressions psychologiques ne sont pas les mêmes quand on est adultes et vegan ou enfants et vegans ou quand on a des enfants et on veut qu’ils soient vegan comme nous. Alors là, il y a bien des pressions, des jugements, des critiques (par des proches, par la famille, par le cadre médical ou professionnel de petite enfance), l’impossibilité des enfants manger selon nos convictions (cantine, établissement médical, etc), la peur d’assumer devant la PMI qu’on ne donne pas de viande ni produits laitiers à nos enfants car ils/elles peuvent ouvrir une enquête pour cette raison, etc, etc….c’est très lourd tout ça au quotidien pour les parents et plus tard, pour les enfants aussi.

Vlavvy 11 octobre 2017 - 14 h 31 min

Pour une fois, je vais me faire l’avocat du diable. 🙂 Je ne défends pas l’utilisation du mot « végéphobie » parce que le terme cause plus de malentendus qu’autre chose, mais pour autant, je pense qu’un bon nombre d’attaques récentes sont assez injustes.

Première remarque : vous citez 18 fois le mot « oppression » dans votre billet. Le manifeste de la végéphobie ne le cite qu’une seule fois, et c’est pour parler des animaux. Vous définissez la végéphobie comme « l’oppression contre les personnes végétariennes ou véganes ». Or, le manifeste la définit comme « le rejet du végétarisme pour les animaux ». Ça change quand même absolument tout. Vous faites passer la notion de végéphobie comme une volonté de certains végéta*iens de se poser en victimes (les vegan tears…), alors que ce n’est absolument pas l’enjeu. Vous connaissez probablement le créateur de la Veggie Pride et des Cahiers antispécistes : s’il milite contre les oppressions depuis 50 ans, ce n’est pas pour le plaisir de se poser en martyr.

Le terme « végéphobie » sert à désigner un phénomène bien réel. Vous réduisez ce que subissent les végétariens à des « moqueries et vexations » : ça va, bien sûr, bien plus loin. Même si la situation s’est améliorée ces dernières années, les menaces et insultes n’ont pas disparu (lisez les commentaires de n’importe quel article mentionnant le végétarisme), les rapprochements réguliers avec le nazisme non plus, un nutritionniste connu peut se permettre de déclarer sur une grande chaîne TV que « les enfants végétaliens sont petits et bêtes » sans être inquiété outre mesure, les lobbys font un énorme travail de désinformation et de décrédibilisation, les chroniqueurs et éditorialistes ne manquent pas de rappeler que nous sommes des extrémistes illuminés et totalitaires, et ainsi de suite. Dans votre livre, vous citez le chiffre des 84 % de végétariens qui se remettent à manger de la viande ; l’étude originale précise que ces personnes jettent essentiellement l’éponge à cause de la « pression sociale ». Alors, à partir du moment où on a un phénomène qui a de l’ampleur et des conséquences bien concrètes, qui sabote la lutte (et les animaux en sont les premières victimes), pourquoi avoir peur de le nommer ? 🙂

Vous rejetez le terme au motif que d’autres oppressions sont bien pires, et prenez le cas de l’homophobie. Bien sûr que l’homophobie est sans commune mesure, mais qu’en est-il des autres phobies ? Il y en a des dizaines, dont vous « reconnaissez l’existence » même si vous ne les citez pas. Quid de la grossophobie, par exemple ? L’oppression subie par les obèses n’est pas non plus comparable à celle que subissent les LGBT en Tchétchénie, faut-il donc rejeter le terme ? Vous notez aussi une autre « différence fondamentale » : le véganisme est un choix, alors que l’homosexualité et la transidentités n’en sont pas. Dans ce cas, faut-il dire que l’islamophobie n’existe pas ?

Vous mentionnez également la polémique du nom « Veggie Pride », qui provoque le mécontentement des personnes LGBT. Rappelons qu’à l’origine, le festival a été créé avec l’approbation de la Gay Pride de l’époque (en 2001). Il y avait des militants communs aux deux mouvements, qui voyaient des parallèles dans les luttes. L’idée était de s’inspirer d’un truc cool pour faire un autre truc cool. C’est tout. Depuis quelques années, le militantisme raisonne en termes d’« appropriation » et d’« invisibilisation », et on voit soudainement des gens se réveiller (certains n’étaient peut-être même pas nés à l’époque) pour nous demander d’où on sort avec un nom pareil et nous ordonner de vite le changer. Alors oui, il faudra le changer, parce qu’on ne peut pas se permettre d’avoir une polémique pareille chaque année. Mais est-ce vraiment un progrès d’être confronté à ce genre de débats alors que les militants acceptaient bien plus volontiers par le passé que les idées soient reprises d’un mouvement à l’autre ? Je pense sincèrement que non.

Bon, j’espère que mon post n’a pas l’air trop virulent. J’admets que les polémiques très vives de ces derniers jours m’ont un peu secoué.

Corinne B 11 octobre 2017 - 15 h 39 min

Bonne analyse. Qui élève bien la discussion. Merci.

Éliot 12 octobre 2017 - 11 h 02 min

Je ne reviendrais que sur une phrase. « L’idée était de s’inspirer d’un truc cool pour faire un autre truc cool ». C’est l’essence du problème. La Marche des Fiertés n’est pas un « truc cool ». C’est la commémoration d’une émeute. Documentez-vous sur l’origine de cette marche pour comprendre que la récupération du terme est déplacée.

Vlavvy 12 octobre 2017 - 11 h 16 min

Bien sûr, l’origine historique est forcément différente, mais est-ce le critère essentiel ? Si des LGBT vont défiler aujourd’hui, c’est davantage pour renforcer leur visibilité et soutenir leur cause que pour commémorer les émeutes de Stonewall.

Encore une fois, j’ai l’impression qu’il y a 16 ans on ne raisonnait pas autant en terme de « récupération » (et je pense que c’était aussi bien). Comme le dit David Olivier en dessous : « On lutte pour des idées, contre des misères, pour le progrès dans le monde, pas pour la sauvegarde des droits de propriété intellectuelle. »

Éliot 12 octobre 2017 - 12 h 00 min

Est un critère essentiel ? Oui. La Pride est vraiment un concept spécifique. C’est le fait d’assumer une différence non choisie et marginalisée dans nos sociétés. Il n’y a pas de Pride VG (pas plus que de Pride féministe). Je suis féministe et queer. Féministe c’est un choix. Je peux ne pas militer les jours sans énergie, cacher mon féminisme. Je ne peux pas faire ça en tant que queer. Je prend toutes les remarques oppressives dans la gueule, même dans les jours sans. Est ce que c’est facile d’être féministe ? Non. Comme d’être VG. Mais les pressions que je subis pour cette raison seront bien différentes de celles que je subis pour mon identité.
Il n’est pas question de propriété intellectuelle, il est question de sauvegarder des termes pour des usages précis, sans quoi ils perdent leur sens politique. Donc les queers perdent un outils de lutte.

D’ailleurs, il existe une Mad Pride. Pose t elle problème ? Non. Les personnes neuroatypiques subissent des oppressions similaires aux queers, ne choisissent pas de l’être donc peuvent réutiliser ce concept sans le vider de son sens.

Vlavvy 12 octobre 2017 - 13 h 47 min

Je vois ce que vous voulez dire, mais j’ai du mal à être convaincu. La Pride consiste à assumer une différence : oui, absolument. Mais une différence *non choisie* ? En quoi le fait que la différence soit choisie ou non serait-il à ce point essentiel ? Et si j’osais pousser un peu plus loin : n’y a-t-il pas au moins autant de raisons d’être fier d’avoir fait un choix que l’on considère bon, plutôt que de ne pas avoir eu de choix du tout… ?

Par ailleurs, vous dites qu’il est possible de ne pas mettre votre féminisme en avant pendant les jours sans ; un VG, lui, ne va pas se mettre à manger de la viande quand il n’a pas la motivation de militer. Sur ce plan-là, donc, on n’échappe pas non plus aux remarques simplement parce qu’on la met en veilleuse. En ce qui me concerne, je n’ai jamais mangé de viande, je suis toujours allé à la cantine, et je n’étais absolument pas militant avant au moins mes 25 ans. Ça ne m’a pas empêché de subir les attaques toute ma vie, et comme je ne connaissais strictement aucun autre végétarien, je me sentais bien seul. Peut-être que ça m’aurait fait du bien d’avoir une Veggie Pride à l’époque — peu importe si l’idée avait été copiée ailleurs.

De toute façon, on est d’accord sur la conclusion : le nom doit changer. On ne peut pas se permettre de revivre cette situation l’année prochaine, et des gens se sentent effectivement mal à l’aise à cause du nom. Mais je pense que ces gens sont mal à l’aise pour de mauvaises raisons. Et il y a quelque chose d’assez crispant dans la façon dont on se fait retirer un nom qu’on a utilisé sans problèmes pendant une quinzaine d’années.

Éliot 12 octobre 2017 - 14 h 27 min

Je suis désolé de constater que vous ne comprenez toujours pas la différence entre vivre avec ses choix militants (vous pouvez remanger de la viande à tout moment si vous le souhaitez) et assumer un truc qui vous tombe dessus et qui ne part jamais – et qui vous condamne à mort dans certains pays. Oui être militant c’est dur, nul, chiant et source de rejet. Mais ce n’est pas la même chose (les queers VG le disent très bien).
Et alors votre passage sur le fait qu’assumer un choix militant c’est aussi bien qu’une condition à laquelle on ne peut rien… C’est le retournement du stimagte qui fonde le concept de pride. C’est d’assumer haut et fort une condition pour laquelle la société veut nous rendre honteuxses. Ce n’est pas une question de fierté au sens commun du terme. C’est un concept, je le répète, politique et très spécifique.
Vous trouvez ça crispant que votre terme Veggie Pride vous soit enlevé ? Faites preuve d’empathie : vous nous enlevez un de nos terme pour le vider de son sens, au passage en prétendant subir une oppression liée à un choix ! Vous ne voyez toujours pas où ça coince ?

Anne-So - ZePermaLab 11 octobre 2017 - 14 h 43 min

Merci pour cet article si instructif Ophélie !
Je connaissais le nom de Veggie Pride et j’avoue qu’en bonne privilégiée, je ne m’étais pas interrogée sur le bien-fondé de cette appellation. J’ignorais totalement que tant de végé en arrivaient à se considérer victimes à la place des victimes… C’est vrai qu’en tant que végé (selon son comportement et son entourage), on peut parfois ramasser, mais ça me semble tellement disproportionné d’en venir à se plaindre d’être victime d’un choix éthique ! M’enfin, c’est vrai que la victimisation est aussi une sorte de « mode » si j’ose dire, héritée peut-être de cette injonction permanente à rester dans l’inaction. Je m’égare.
Belle journée à toi, et merci encore pour ce nouveau grain à moudre !

yves bonnardel 16 octobre 2017 - 17 h 00 min

Anne-So – ZePermaLab, ne te laisse pas avoir par le texte manipulateur de Ophélie ; tes commentaires sont du coup offensants pour nous tous et toutes qui nous battons pour la cause animale et qui voulons visibiliser la végéphobie pour tout le mal qu’elle fait, en priorité aux non-humains : comme le rapelle Ophélie elle-même dans son bouquin, d’après ce que dit Vlavvy juste plus haut dans le fil des commentaires, il y aurait « 84 % de végétariens qui se remettent à manger de la viande », essentiellement à cause de la pression sociale. Ça fait un certain paquet d’animaux qui y passent chaque année. Bien pire, ça fait beaucoup de militants en moins, d’autant que la pression sociale empêche aussi de militer, et même de penser correctement ce à quoi on s’affronte. Et, contrairement à ce que tu dis avec beaucoup de légèreté, je ne connais aucun végé qui se considère « victime à la place des victimes » ni qui fait de la victimisation ; quand on parle de végéphobie, c’est pas pour se plaindre, c’est pour dénoncer et combattre. Ton commentaire illustre bien l’effet désinformateur et dépolitisant du texte de Ophélie. Et son côté pour le coup offensant et indécent pour les militants. Je trouve que Ophélie devrait s’excuser d’avoir écrit un truc pareil.

Johanna 16 octobre 2017 - 18 h 40 min

S’excuser d’avoir écrit un truc pareil ? Non mais quel toupet ! En tant que queer végane, je peux vous assurer que le texte d’Ophélie est la chose la plus sensée que j’aie lu depuis longtemps. Et que ça fait du bien, tellement du bien.
D’ailleurs, si vous aviez lu son livre, vous sauriez que la 1ère raison qui fait que 84% des gens arrêtent en cours de chemin leur véganisme, c’est en raison du manque d’engagement dans le mouvement végane ! Avec une telle dictature de la pensée, comme vous l’incarnez bien, je comprends pourquoi tellement de gens ne parviennent pas à s’engager dans ce mouvement. La pression sociale n’arrive qu’en 3è position. Il faudrait peut-être mieux s’informer avant d’affirmer.
Et si vous aviez lu son livre, vous sauriez qu’Ophélie a une démarche autrement plus bienveillante, ouverte et inclusive que la vôtre. Qu’elle y consacre justement toute une partie à la question sociale (elle détaille longuement, en les nommant, les discriminations au travail et à l’école) et qu’elle y reconnaît pleinement la difficulté de devenir végane. Mais quel culot, ce que vous affirmez. Et honte à vous, à votre bashing sur les réseaux sociaux, votre trolling sur ce blog. Quand c’est un homme comme Théo Ribeton ou Martin Page qui dit qu’il ne faut pas parler de végéphobie, où sont vos insultes et vos attaques ? Vous êtes des lâches sexistes qui plus est. Bravo à Ophélie qui accepte tous vos commentaires insultants. Merci à elle pour tout ce qu’elle fait pour la cause animale et bien plus encore !

Vlavvy 16 octobre 2017 - 18 h 52 min

Ma réponse avec la source apparaît en bas de la page (j’ai dû faire une fausse manip ou alors il y a eu un bug).

Matmout 17 octobre 2017 - 10 h 42 min

Il semblerait donc bien (d’après le rappel de Vlavvy) que ça soit la pression sociale qui soit la première cause. Ce qui ne me semble pas surprenant.

Personnellement, j’ai lu (et adoré) le livre d’Ophélie, et du peu que je la connais je l’apprécie et la respecte beaucoup pour son travail. Mais, même sans forcément parler de texte « manipulateur », moi aussi j’ai eu un sentiment étrange en le lisant (ça semblait couler de source son argumentaire si bien formulé, mais quelque chose coinçait), et j’ai compris toute la problématique d’un tel texte à force d’échanger ici et de lire d’autres commentaires. Je partage le point de vue d’Yves Bonnardel sur le fait que son article semble retirer toute revendication politique au terme « végéphobie », en faisant passer les gens qui l’utilisent pour des privilégiés qui veulent se faire victimiser, et en criant à l’indécence quand bien même la position « adverse » serait très sérieusement argumentée et empathique. Je pense qu’il serait sympa de sa part de donner un rapide « droit de réponse » à des gens qualifiés pour exprimer leur désaccord de façon cordiale et argumentée, vu que, volontairement ou non, elle déforme un terme et limite sa portée pour mieux le critiquer. Et je pense que beaucoup de gens « peuvent se faire avoir » par sa prose. C’est assez sournois d’ailleurs (involontairement, je pense), puisque, si on admet d’être quelque part privilégié par rapport à d’autres, on se sent obligé d’adhérer, sous peine de se sentir comme un salaud fini. A mon avis, c’est ce qui se passe avec beaucoup de gens qui disent qu’ils sont d’accord.

Et honnêtement, faut arrêter de crier au sexisme là où il n’y en a. On est censés faire quoi ? Ne pas exprimer de désaccord parce que c’est une femme ? C’est là que serait le sexisme. Je pense que personne ici ne critique sa personne ; simplement l’article en question. Ça serait pareil si quelqu’un d’autre l’avait écrit. Ça va 5 minutes la fausse indignation pour faire taire les gens.

Ophélie ne s’exprime pas vraiment sur les commentaires, donc je vais me garder de parler à sa place. Mais je rappelle juste qu’elle a dit dans l’article ci-dessus « il est acceptable, pardonnable d’être dans l’erreur », et qu’elle a remercié la Veggie Pride pour son ouverture aux critiques constructives. Donc je ne pense pas qu’elle se sente particulièrement « insultée » pas les commentaires divergents, même si c’est pas forcément agréable à entendre.

Je me joins d’ailleurs à toi pour la remercier pour tout ce qu’elle fait, mais je maintiens que cet article est, de mon point de vue, une erreur de parcours (tout à fait pardonnable comme elle le dit bien, et qui pourrait être facilement rattrapée avec un droit de réponse à visibilité équivalente, même si celui-ci doit être précédé de « Bon, je suis pas d’accord avec ce qui suit, mais voilà un point de vue opposé à mon dernier article »).

fredericmesguich 11 octobre 2017 - 14 h 45 min

Passé la répétition de la conclusion comme argument tautologique, le seule autre argument contre la qualification d’oppression est le fait qu’une comparaison vaille équivalence.
Le texte contient bien plus de contre-arguments à sa conclusion que d’arguments pour la soutenir.
Toutes les oppressions ne sont pas systémiques, et le terme « oppression » est très large: https://fr.wikipedia.org/wiki/Oppression

Je ne sais pas quoi y voir à part une concurrence victimaire cherchant à s’approprier un terme en refusant à des victimes le droit de nommer ce qu’elles subissent.

David Olivier 11 octobre 2017 - 15 h 05 min

Désolé, Antigone, de lire une telle série d’absurdités sous ta plume. Je ne sais pas où commencer.

Tout d’abord, tu dis que les personnes qui parlent de végéphobie sont insensibles à la réaction des LGBTI, etc. qui critiquent ce terme. Non. Je n’y suis pas insensible, j’en suis très irrité. Ces personnes se croient propriétaires d’une expression, et elles n’en sont pas propriétaires. Personne n’est propriétaire de concepts et de mots. En quoi sont-elles lésées par l’usage du terme? Cela «minimiserait» leur sort? En rien. La réalité est que leur réaction est elle-même, tout simplement, l’expression de leur propre végéphobie et de leur propre spécisme (dont tu te fais, désolé de le voir, la courroie de transmission).

Il serait peut-être temps de cesser de voir les diverses luttes et «communautés» comme une collection de petits propriétaires. On lutte pour des idées, contre des misères, pour le progrès dans le monde, pas pour la sauvegarde des droits de propriété intellectuelle.

Il semblerait que les diverses réactions adverses de la part de ces petits propriétaires, habillées à la sauce «intersectionnelle», soit l’unique vraie motivation de ta condamnation du terme. Le reste de ce que tu dis est du pipi de chat. «Nous risquons de nous mettre à dos la plupart de nos allié·e·s potentiel·le·s» – mais quelle petitesse, quelle démagogie! Quel mépris, en définitive, pour ces «allié-e-s potentiel-le-s» qui seraient incapables de remettre en cause leur spécisme parce que certaines personnes antispécistes utilisent un mot qui leur appartient!

Je vois aussi répéter à gogo, dans ton texte et ailleurs, l’idée selon laquelle puisqu’on choisit d’être végane, alors qu’on ne choisit pas, par exemple, d’être homo, la végéphobie ne peut être une oppression comme l’homophobie. D’où tu tires, exactement, qu’on ne choisit pas d’être homo? C’est une thématique qui semble maintenant correspondre à une orthodoxie inattaquable, mais dans toute la grande première période des mouvements gais et lesbiens, on affichait au contraire fièrement l’idée selon laquelle l’homosexualité était un choix politique. À l’époque c’était les homos les plus timorés, voire réactionnaires, qui insistaient au contraire que «c’est pas de ma faute, je suis né comme ça». En réalité, l’apparition de cette orthodoxie correspond à un recul, largement propulsé par les États-Unis imprégnés de religion, pour expliquer que l’homosexualité ne peut être une faute puisque «Dieu» (ou «Nature») «nous a créés comme ça». Et la réalité psychologique est bien au contraire que l’homosexualité peut bien être, non sans doute pour tout le monde, mais pour beaucoup, un choix. Et c’est un choix dont il n’y a pas lieu d’avoir honte, pas plus que si on est «né comme ça».

Et si tu acceptes le terme d’islamophobie, c’est que pour toi être musulman n’est pas un choix? On est «né comme ça»? Et la judéophobie? Ce terme, avant de prendre une connotation raciale, correspondait à la haine antijuive impulsée par le christianisme contre les personnes partageant les *croyances* de la religion juive, et qui était donc, autant que le fait d’être musulman, un choix.

«Nous ne sommes pas les concerné·e·s de la lutte animale : nous n’en resterons toujours que les allié·e·s.» – voilà le fond de ce que je trouve insupportable dans cette critique. Il s’agit en fait de l’incapacité de réellement s’identifier aux animaux. Psychologiquement, l’opposition constante faite entre notre sort de militants antispécistes et le sort des animaux non humains ne correspond pas à la simple reconnaissance du fait évident que notre sort est plus doux que le leur. Il correspond à une féroce volonté de bien nous séparer d’eux. De ne pas confondre, même un peu. Sous des dehors de radicalité, sous un fatras de vocabulaire «intersectionnel» bien pensant, on refuse simplement ce pas de se sentir, oui, profondément concernés par le sort de tous les sentients.

Et c’est vraiment un gros problème en soi.

Éliot 12 octobre 2017 - 11 h 05 min

Si on résume « Ce n’est pas moi qui est LGBTphobe, ce sont les autres qui sont spécistes ! « Vous faites exactement ce que vous reprochez aux autres ! De plus, des LGBTs végé dénoncent aussi l’emploi de ce mot…

Éliot 12 octobre 2017 - 11 h 33 min

Aller, en passant : vous croyez vraiment que les homosexuel.le.s condamné.e.s à mort dans les 7 pays où c’est encore possible avaient choisi de l’être ?
Les mouvements LGBTs n’ont jamais parlé de choix d’orientation mais de choisir de l’assumer (d’où la fierté à l’assumer, pas à l’être), ce qui fait une légère différence.

David Olivier 16 octobre 2017 - 11 h 32 min

Je n’ai pas dit que l’homosexualité est un choix pour tout le monde. J’ai écrit «la réalité psychologique est bien au contraire que l’homosexualité peut bien être, non sans doute pour tout le monde, mais pour beaucoup, un choix». Caricaturer les propos de l’autre pour pouvoir le discréditer, ça s’appelle le sophisme de l’homme de paille.

Ceci dit, il y a bien des cas dans l’histoire, et dans l’actualité présente, où des gens sont exécutés pour leur religion, ou pour leur athéisme, ou pour telle ou telle autre opinion non conforme. Il est bien évident que le fait d’avoir une telle opinion – ou au moins, de la manifester – est un choix; pourtant, les gens font ce genre de choix, même face à la menace d’être exécuté. Donc l’existence de personnes homosexuelles dans les pays où on exécute les homosexuels ne prouve pas que l’homosexualité n’est pas un choix.

trolldejardin 11 octobre 2017 - 15 h 15 min

Je suis complètement d’accord avec ton article, Antigone21.
Je rajouterais que la majorité des problèmes qu’on peut subir en tant que végane / végé, ce sont des problèmes liés au handicap, à la maladie, aux oppressions systémiques… Et donc que si t’es une personne valide, neurotypique, de classe moyenne, blanche, et de préférence dans la norme sur le reste, bah globalement tu auras peu voire pas du tout d’emmerdes.

Et ce sont justement ces gens (mecs cis hétéros blancs valides NT aisés) qui envahissent le milieu végane, parce que pour eux c’est la lutte la plus facile (je dis bien « pour eux », c’est souvent au contraire une des plus difficiles pour d’autres, question de condition sociale). Et qui nous les brisent.

En fait, le véganisme se porterait mieux si on virait les privilégiés du mouvement.

David Olivier 11 octobre 2017 - 15 h 23 min

Bien heureusement, Trolldejardin, ni toi ni personne n’a autorité pour «virer» qui que ce soit du mouvement.

Je pense seulement que le mouvement se passerait bien des petits staliniens.

Corinne B 11 octobre 2017 - 15 h 45 min

et d’un troll de poubelle!

woli 11 octobre 2017 - 16 h 00 min

Vous avez beau dire, se faire taquiner -même méchamment- par ses voisins automobilistes parce qu’on va bosser à vélo, ça n’est pas de la vélophobie et ce n’est pas qu’une différence d’intensité avec le racisme, c’est juste pas de l’oppression.

Sharlin 11 octobre 2017 - 16 h 03 min

Pour les mecs blancs qui racontent de la merde au dessus

Premier point.

S’il vous plaît, arrêtez de dire que vivre ou non de l’islamophobie, de l’antisémitisme (judéophobie) est un choix. Déjà, musulman et juif, ce sont des mots au sens large : croyance et pratique religieuse, mais aussi culture, communauté… En particulier pour les juifs : les juifs forment des groupes ethniques, culturels, linguistiques, définis par leur judéité, et une personne qui n’est pas croyante et pratiquante de la religion peut tout de même faire partie de la culture.

Je sais que vous êtes habitués au modèle catholique français, où en gros « une personne est catho par le baptême et sa pratique, et puis à côté, elle a sa nationalité, son identité ethnique, et ça n’a rien à voir ».
Scoop : ça marche pas comme ça pour toutes les religions ou tous les groupes culturels.

D’ailleurs il y a beaucoup de groupes ethnoculturels dans le monde.
Exemples :
En Bosnie-Herzégovine, les trois groupes sont « Croates » (catholiques), « Serbes » (orthodoxes), « Musulmans », et une personne fera partie d’un de ces groupes selon sa naissance, sa langue, sa culture… Et ce, MÊME SI elle n’est pas croyante ou pratiquante. D’ailleurs, pendant la Guerre de Yougoslavie, les massacres ne faisaient pas de différence entre une personne pratiquante ou non.

En Irlande du Nord, les deux groupes sont « les Protestants » (descendants des colons britanniques), et « les Catholiques » (irlandais natifs), pareil, c’est une question de naissance, de culture, de statut social… d’abord.

———————–

Ensuite (et surtout), une personne qui naît dans un milieu culturel juif ou musulman, ou qui est perçue (à tort ou à raison) comme juive ou musulmane en fonction de son nom de famille, de sa tête, de son prénom, de son accent, de sa couleur de peau et j’en passe.

Et je sais de quoi je parle, ma famille est d’origine juive algérienne, même si elle a globalement perdu sa culture à cause, justement, du racisme et de la pression pour s’intégrer. Et des personnes de ma famille ont déjà, par exemple, été insultées, menacées, agressées, parce que LEUR NOM DE FAMILLE les affichait comme juives et arabes. Pourtant ces personnes ont toujours été purement athées et culturellement européennes. Mais ça, les racistes s’en foutent, ils vont pas vérifier.

Pareil, si une personne avec un nom juif ou une tête d’arabe est jugée pour un crime, la presse va parler de la personne comme d’une personne juive ou musulmane, ou de ses « origines musulmanes », sans même vérifier si la personne est effectivement de religion (et de culture) juive ou musulmane. Dans la rue, la police va voir « des musulmans » et s’en prendre à eux simplement sur leur apparence. Idem dans les entretiens d’embauche, pour louer un appartement, en cours à l’école, etc.

Donc.
NON, SUBIR L’ANTISÉMITISME ET L’ISLAMOPHOBIE NE RÉSULTE PAS D’UN CHOIX.

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Les violences et les discriminations islamophobes et antisémites ne sont pas juste une question de religion, de privilège des chrétiens sur les autres (même si il y a de ça, évidemment).
Si vous voulez voir à quoi ressemble une discrimination purement religieuse, regardez plutôt le cas des wiccanes, des néopaïens…

Ce qui fait que ces religions (musulmane et juive) concentrent autant de violences, de discriminations, de stigmatisation… c’est qu’elles appartiennent à des groupes étrangers (à l’Europe) ou perçus comme tels (les Juifs ashkénazes sont toujours perçus comme « étrangers » de manière explicite ou implicite, même après avoir passé des siècles en Europe, tandis que les descendants d’immigrés maghrébins restent perçus comme étrangers).

Cette histoire est inséparable de la ghettoïsation des juifs, de leurs expulsions et spoliations régulières pendant tout le Moyen Âge, des mesures de discrimination légale contre les juifs (et les tsiganes) jusqu’au mi-20ème siècle, des classifications raciales (dans lesquelles même les Juifs blancs européens étaient comptés comme « Sémites », donc inférieurs à la race blanche « caucasienne »), de la colonisation, de la traite négrière, de la Shoah, des guerres d’aujourd’hui (Afghanistan, Irak, Syrie), de l’exploitation économique des immigrés non-européens et leurs descendants, etc.
D’ailleurs, les nazis s’en foutaient de la religion réelle des gens, si tu avais du sang juif ils te déportaient, point.

Cela dépasse donc très, très largement le fait que « ils ont une religion différente du christianisme ». C’est avant tout le fait d’être perçus comme étrangers à la civilisation européenne, et ce, de manière naturelle et héréditaire, qui joue.

Renseignez vous avant de parler, merci

David Olivier 11 octobre 2017 - 16 h 28 min

Ta description des faits concernant l’islamophobie ou la judéophobie correspond à une réalité partielle, mais seulement partielle.

Mais de toute façon: qu’est-ce que ça change qu’on ait choisi ou pas la chose pour laquelle on est opprimé? Certes, si c’est une chose qu’on a choisie, on pourrait échapper à l’oppression en changeant son choix, mais cela change-t-il la nature de l’oppression? Quand un pouvoir opprime les grévistes, c’est pas grave, puisqu’ils pourraient ne pas être grévistes?

Ton truc, c’est que la végéphobie n’est pas une vraie oppression, parce qu’après tout je pourrais y échapper en recommençant à manger les animaux?

Sharlin 11 octobre 2017 - 18 h 59 min

La question, c’est que honnêtement ça m’emmerde de voir des personnes qui ne sont clairement pas concernées et n’y connaissent rien, se lancer dans des tirades pour nous expliquer que l’islamophobie et l’antisémitisme c’est juste une question de religion, du choix de pratiquer la religion ou non. Et que ces arguments-là sont vus et revus (chez les véganes et partout ailleurs, rien de spécifique).
Et ça m’emmerde que le monde entier marche sur le modèle français laïco-catho (en gros « il y a ta religion d’un côté, et puis ta nationalité et ton ethnie de l’autre, et aucun rapport entre les deux »), et que les discriminations religieuses seraient séparées du racisme. Alors que ce n’est une réalité, justement, que pour les personnes blanches (et athées ou chrétiennes) des pays occidentaux.

David Olivier 12 octobre 2017 - 22 h 22 min

«Des personnes qui ne sont clairement pas concernées» – cette phrase exprime bien l’orthodoxie intersectionnaliste, pour laquelle si on n’est pas directement victime d’une oppression, on n’est pas concerné.

Quand j’étais jeune – dans les années post-68 – on nous incitait à nous sentir concernés par tous les malheurs du monde. Et je pense que c’était juste. Aujourd’hui, l’orthodoxie veut nous interdire de nous sentir concernés par autre chose que nos propres malheurs.

(Sauf évidemment quand il s’agit d’expliquer aux autres que leurs malheurs ne sont pas réels, et qu’ils n’ont pas le droit d’employer les termes qu’ils veulent, par exemple «végéphobie».)

Éliot 13 octobre 2017 - 6 h 19 min

On ne vous dit pas que vous malheurs ne sont pas réels, juste que leur désignation est inapropriée car VGphobie se calque sur le modèle des oppressions systémiques, ce que la discrimination des VG n’est pas (même l’orga de la veggie pride le dit !)

David Olivier 13 octobre 2017 - 19 h 19 min

L’orga de la Veggie Pride peut dire ce qu’elle veut; elle n’a l’autorité que de ses seules opinions.

La distinction entre oppressions systémiques et non systémiques est bidon.

Éliot 15 octobre 2017 - 15 h 33 min

Si la distinction est bidon, alors demain une personne discriminée à l’embauche ou moquée dans la rue à cause de son look pourra crier à l’oppression systémique car elle se sentira discriminée ? Oui, le terme de discrimination est adapté, mais pas celui d’oppression, soyons sérieux. Vous même trouverez ça probablement ridicule comme motif d’oppression, mais après tout, en quoi une discrimination subie à cause d’un choix vestimentaire serait moins valable qu’une oppression liée à des choix militants ? Après tout, cette personne aura réellement subie des moqueries, tout comme vous.
Enfin, je doute que ce soit réellement pertinent de débattre avec vous, vous avez décidé que vous étiez opprimé aux même titre que nous, très bien. Cela ne fait que prouver votre absence totale d’empathie et de remise en question.
On notera quand même que celleux qui critiquent la notion d’oppression systémique (voir la refuse comme vous) sont bizarrement celleux qui n’en subissent pas. Étrange phénomène.

Vlavvy 15 octobre 2017 - 22 h 29 min

Je ne trouve pas que ce soit si ridicule. Le lookisme est une vraie discrimination, qui peut effectivement être qualifiée d’oppression (mais ça dépasse généralement le cadre vestimentaire).

Cela dit, si vous avanciez cette comparaison pour ridiculiser la végéphobie, rappelons que dans le second cas il y a quelques milliards de vies animales en jeu. La végéphobie, c’est aussi la stratégie qui consiste à ridiculiser le messager pour ne pas avoir à prendre en compte le message. C’est en ça que c’est un problème et qu’il doit être qualifié. On ne fait pas ça pour victimiser pour le plaisir, hein. Juste pour nommer un phénomène qui a une énorme ampleur et des conséquences catastrophiques.

Par ailleurs, si vous résumez la végéphobie à des « moqueries », vous n’avez encore certainement pas pris la mesure du phénomène. David et moi avons refusé de manger de la viande dès l’enfance, donc si on vous certifie que c’était la merde, vous pouvez nous écouter. Sauf si le principe consistant à écouter les concerné·e·s s’arrête à partir du moment où iels ne sont pas du même avis que vous ?

Prenons simplement un exemple. Imaginez un enfant musulman que l’on forcerait à manger du porc à la cantine. Ça ferait scandale, et personne n’hésiterait à parler d’islamophobie. Or, il est arrivé que des enfants végétariens soient (physiquement) obligés de manger de la viande à la cantine. Pensez-vous que leur souffrance était moins importante à ce moment ? Se sont-ils dit « on m’oppresse mais de façon non systémique donc ça va » ? Pourquoi refuser de traiter des cas semblables de façon identique ? Aucune des différences que vous pourrez avancer entre ces deux exemples n’a de pertinence dans la qualification d’oppression. Dans le premier cas, on a une victime d’islamophobie, et dans le second cas de végéphobie.

Végéphobie = moins de végétariens = plus d’animaux égorgés.

Vlavvy 15 octobre 2017 - 23 h 02 min

Vous savez, à un moment, je disais texto ceci à ceux qui voulaient l’entendre : « Je me fiche pas mal des attaques contre les véganes. Je suis là pour défendre les animaux, pas les véganes. » Et je me sentais probablement très bien en le disant, parce que ça permettait d’afficher clairement mes motivations purement altruistes tout en assumant le fait de cocher moi-même à peu près toutes les cases du bingo du privilégié.

Et puis à un moment j’ai réalisé que les attaques contre les véganes avaient une importance, parce que c’était aussi pour ça qu’on n’était même pas 1 % en France. Parce que quand la mode est de taper sur les véganes à tour de bras, personne n’a envie de passer du côté du tapeur au côté du tapé. Quand tout le monde dit que le véganisme est un truc d’illuminés totalitaires, personne n’a envie de devenir un illuminé totalitaire. Quand on dit à la TV que les véganes sont des crétins carencés, personne ne veut devenir un crétin carencé. Et pendant ce temps les animaux continuent de crever.

Donc oui, la végéphobie est une réalité et a une importance. Et prétendre qu’on utilise ce terme juste pour victimiser et avoir de l’attention, c’est effectivement assez dégueulasse.

Éliot 16 octobre 2017 - 9 h 35 min

Oula. Si le lookisme devient une vraie oppression on est pas sorti.e.s du sable…

Ce que vous nommez végéphobie est pour moi une expression du spécisme. Elle ne nécessite pas d’avoir un terme à part, désignant spécifiquement les allié.e.s. Mais je ne nie pas l’ampleur ni la gravité du phénomène. Je n’ai jamais dit que la souffrance d’une personne n’avait d’importance que lorsqu’elle résultait d’une oppression systémique. Je ne compare les souffrances de personne, pour la simple et bonne raison que c’est impossible. Je parle uniquement d’usage politique des mots. Merci d’arrêter votre procès d’intention et de relire mes interventions.
Pour vous faciliter la tâche, un petit copié-collé de ce que j’ai déjà écrit : »Si je devais théoriser le rejet et la discrimination vis à vis des VGs, je dirais qu’iels subissent par retour de flamme les conséquences de la pensée spéciste omniprésente et portée par la plupart des gens. Mais ça n’a rien à voir avec une oppression systémique séparée. Ce sont des victimes indirectes d’un système d’oppression, parce qu’iels prennent la défense des premiers concernés, les animaux. Utiliser le terme de VGphobie est un non sens. Il met clairement l’accent sur la condition actuelle des VGs. Je ne pense pas qu’il soit pertinent pour visibiliser le sort des animaux, en plus d’être incorrect conceptuellement. »

Pour vous faire un parallèle : je suis blanc, je lutte (aussi bien que je peux) contre la racisme. je suis donc un allié. Ça suppose alors de lutter contre 99% de mes compatriotes qui perpétuent, consciemment ou non, cette oppression. Ce qui suppose de se mettre à dos des gens de manière très régulière, d’argumenter, de se faire traiter de sectaire, de faire capter des repas de famille et j’en passe. Bon. Est ce que je me revendique d’une antiracismephobie ? Est ce que j’ai inventé la Pride des Blanc.he.s-qui-sont-trop-cools-parce-qu-iels-luttent-contre-le-racisme ? Non. La place d’allié.e.s, aussi dur à tenir soit elle, est une place d’allié.e.s. Elle est toujours plus enviable que celles des concerné.e.s, qui subissent l’oppression ET luttent contre elle. Les allié.e.s ne subissent pas d’oppression pour leur militantisme. C’est ce simple fait que j’essaie de faire passer.

Je n’ai jamais dit que les VGs ne souffraient pas. Je vous crois sur parole quand vous me dites qu’on oblige des enfants à manger de la viande à la cantine. Et j’en suis scandalisé. Je ne nie pas la violence, je conteste sa qualification.

Vlavvy 16 octobre 2017 - 10 h 10 min

Je suis d’accord que la végéphobie est une expression du spécisme. C’est particulièrement visible dans les expressions qui visent à nous assimiler à ceux que l’on défend avec l’objectif de nous rabaisser, par exemple avec le qualificatif « brouteur de luzerne » ou le slogan des éleveurs « sauvez un paysan, mangez un vegan ». Ce n’est effectivement pas vous qui avez le plus contesté l’ampleur et la gravité du phénomène, mais vous l’avez tout de même résumé à des moqueries plus haut, et c’est ce à quoi je réagissais.

Encore une fois, je ne sais pas si la végéphobie est systémique ou non, et je pense que ce n’est pas vraiment la question. La végéphobie, c’est le rejet du végétarisme, rien de plus. S’il y a un sentiment individuel anti-végé massif, alors il y a végéphobie. Pensez-vous que la grossophobie soit plus systémique que la végéphobie ?

Pour le parallèle avec des autres luttes : si de tels phénomènes avaient une existence concrète et une ampleur comparable, je ne vois pas ce qu’il y aurait de choquant à parler d’antiracismophobie ou de féminismophobie (et pas seulement pour les blancs ou les mecs). D’ailleurs, dans certains milieux, je pense que la féminismophobie est une réalité. Ce n’est pas prendre la place des victimes que de mettre un mot sur un phénomène. Celles-ci seront de toute façon les premières perdantes si la lutte visant à les défendre est sabotée. Cela dit, à l’heure actuelle, j’imagine difficilement qui que ce soit oser dire à la TV que le féminisme et l’antiracisme c’est pour les tarés.

Un cas concret : https://www.vegactu.com/actualite/cohen-ou-quand-sa-vegephobie-explose-sur-canal-10997/
Là, par exemple, le terme « végéphobie » me semble parfaitement adapté. On ne peut pas dire que c’est juste du spécisme, il ne parle même pas des animaux. En revanche, il rejette le véganisme, insulte tout le monde et cause des dégâts considérables au mouvement. Cette attitude est assez répandue et prend des formes assez diverses pour mériter son propre terme. Mettre un mot sur un phénomène que presque personne ici ne conteste ne devrait pas faire aussi peur.

Vlavvy 16 octobre 2017 - 10 h 25 min

Après, si notre seul désaccord porte sur le fait que la végéphobie ne devrait pas avoir son propre mot, j’en disconviens mais je peux vivre avec. L’idée de toute façon n’est pas de mettre la végéphobie en avant dans nos luttes, mais d’en être conscient, de la prendre en compte et de savoir aussi la combattre. Mais là on est déjà loin de ce que dit Ophélie dans son billet.

Sharlin 11 octobre 2017 - 16 h 05 min

Et aussi, arrêtez de vouloir nous expliquer l’homosexualité et l’histoire du mouvement homo, en sortant des moments passés de leur contexte.
Et les homos « timorés » vous emmerdent.

David Olivier 11 octobre 2017 - 16 h 35 min

En quoi ai-je sorti les moments passés de leur contexte?

De façon générale, si tu as des arguments, tu peux les indiquer. Pour ma part, j’ai autant de légitimité à dire les choses que toi.

Éliot 12 octobre 2017 - 12 h 02 min

L’idée aussi, c’est de ne pas s’approprier la parole des concerné.e.s et leur histoire. Il y a donc des gen.te.s plus légitimes à s’exprimer que d’autres. Mais je doute que tu adhères à ce genre de principe.

Nicolas Servant 15 octobre 2017 - 21 h 21 min

Tu confonds « des gens plus légitimes à s’exprimer que d’autres » avec ta volonté à silencier ceux que tu juges, à tort ou à raison, être des non concernés.
Se soucier des autres c’est être concernés par les autres et c’est quelques chose qu’il conviendrait de ne pas utiliser contre les gens. A moins que la parole soit confisqué, ici tout le monde peut s’exprimer. Dans une salle pour une conférence là c’est pas pareil et là effectivement on pourrait ressortir cette idée que certains-es ont une parole plus légitimes que d’autres pour donner la parole. Mais ici, une telle logique ne tient pas dans ce contexte là précis d’une série de commentaire sous un blog.

Éliot 16 octobre 2017 - 9 h 40 min

David Olivier n’est pas queer, ce n’est pas un jugement de ma part mais un fait. En l’occurrence je faisais référence au fait qu’il réarrange l’histoire queer à sa sauce pour argumenter, et c’est honteux. Il ne se soucient pas des queers, il les instrumentalisent.
Effectivement il a le droit de s’exprimer (bien malheureusement), mais j’ai parfaitement le droit de lui dire qu’il tient des propos inadmissibles et d’essayer de lui inculquer une once de décence.
Tu t’indignes de mon commentaire alors qu’on parle de quelqu’un qui affirme que l’homosexualité est un choix. Drôle de priorités.

David Olivier 16 octobre 2017 - 11 h 26 min

Les gens qui sont homos, ou queers, etc. peuvent s’exprimer et parler des questions d’homosexualité, du queer, etc.

Et les gens qui ne sont pas homos ou queers aussi.

Dans certains cas, bien entendu – genre témoignage personnel – il est logique que les premiers soient plus compétents.

Mais de façon générale, il n’y a pas besoin de faire partie d’un certain groupe pour être compétent pour parler de choses à propos de ce groupe. La réalité est une, et toutes les paroles sont a priori légitimes.

Je trouve extraordinaire qu’on parle d’appropriation de la parole ou de choses comme ça. Les mots n’ont pas de propriétaires.

David Olivier 11 octobre 2017 - 16 h 52 min

En réponse à un autre auteur qui faisait le même genre de critiques (comme quoi, il n’y a pas grand chose de nouveau):

https://www.lecourrier.ch/110694/la_vegephobie_est_partie_integrante_de_l_oppression_des_animaux

«

La végéphobie est partie intégrante de l’oppression des animaux
Jeudi 20 juin 2013
Lettre De Lecteur

CAUSE ANIMALE • David Olivier, fondateur de la Veggie Pride, réagit à la récente prise de position de Bertrand Cassegrain sur la végéphobie.

L’article de Bertrand Cassegrain publié dans Le Courrier du 25 mai dernier a le mérite de rappeler que la notion de végéphobie ne fait pas l’unanimité, y compris parmi les personnes qui, comme lui, sont végétariennes par éthique. De fait, depuis la première Veggie Pride à Paris en 2001, la végéphobie fait débat au sein même de la mouvance animaliste. Les critiques sont bien représentées par le texte de M. Cassegrain et résultent à d’une mauvaise compréhension de la notion et d’un défaut d’appréciation des faits.

Les animaux sont soumis à une violence inouïe. Dès lors que nous disons et montrons concrètement notre solidarité avec eux en refusant de manger leur corps, c’est-à-dire en étant végétariens, il est inévitable que cette violence déteigne sur la manière dont nous-mêmes sommes traités. C’est le contraire qui serait extraordinaire. Notre statut d’humains nous protège – jusqu’à un point. La végéphobie, c’est le décalque sur nous de la violence faite à eux.

La violence faite aux animaux n’est pas un simple processus mécanique. Elle est d’abord fondée sur un refus d’entendre: d’entendre le cri du cochon qui a peur et qui ne veut pas mourir, d’entendre l’appel de la vache qui veut retrouver son veau. La végéphobie, elle, est le refus d’entendre les végétariens: le refus de tout débat réel sur la légitimité de la consommation de la viande. La violence faite aux animaux est ensuite une contrainte: celle de mourir. A nous, la végéphobie veut imposer la contrainte de les manger.

M. Cassegrain nous reproche de jouer les victimes, à la place des animaux: «Ce sont bien eux les victimes, pas nous, et ce sont eux qui devraient être mis en lumière.» Cette opposition est absurde. Oui, la violence que nous subissons est plus douce que celle qui les frappe. Mais quand une cafétéria universitaire me refuse l’affiche de la Veggie Pride au motif que «les végétariens sont une secte», c’est nous et eux qu’on réduit au silence. Lorsqu’on force les parents à donner de la viande à leurs enfants par des arguments nutritionnels mensongers, c’est à ces humains et aux animaux qu’on impose la boucherie.

Aujourd’hui les animaux non humains ne possèdent, légalement, aucun droit. Nous militons pour que cela change, mais ne pouvons l’exiger. Mais nous pouvons exiger le respect de nos droits. Notre droit de refuser de participer à la boucherie et, plus important encore, notre droit de faire entendre la voix des animaux à travers la nôtre sont les seuls droits que ceux-ci possèdent aujourd’hui.

M. Cassegrain écarte la réalité concrète de la végéphobie en une phrase, affirmant que nous ne sommes pas discriminés à l’embauche, qu’on ne nous tabasse pas dans la rue, etc. Je renvoie le lecteur en particulier au site vegephobia.info ainsi qu’à la brochure La Végéphobie1 et au site de la Veggie Pride 20132 pour les nombreux témoignages qui contredisent cette assertion. Voici seulement quelques exemples:
On ne nous tabasse pas? J’ai le souvenir des raclées reçues quand, petit, j’ai voulu refuser de manger les animaux. Le fait est courant. Adulte, j’ai été frappé dans la rue par des personnes qui haïssaient «les végétariens qui se croient supérieurs». Discrimination à l’embauche? «[L’employeur] m’a dit, je cite, ‘je vois que vous vous intéressez à la protection animale, avez-vous une alimentation particulière?’, je lui ai donc dit que j’étais végétalienne. Sa réaction a été de [me dire] de foutre le camp parce qu’il ne voulait pas embaucher de terroristes.3»

La contrainte de manger les animaux est réelle pour une large part de la population, et passe par une désinformation médicale systématique. Que disent les autorités françaises aux adolescents végétariens? De manger du poisson. Et aux végétaliens? «Ne suis surtout pas ce régime.4» L’attitude d’un médecin donné peut provenir d’un manque d’information. L’attitude des autorités publiques, par contre, constitue une rétention d’information délibérée. Pour verrouiller le tout, en France, depuis 2011, il est interdit par décret aux cantines scolaires de recevoir les végétariens, et même de servir un seul repas sans produits animaux5. Le résultat concret est l’interdiction de la solidarité avec les animaux pour des millions de familles.

Enfin, M. Cassegrain se moque de ce que nous nous plaignions des moqueries. Pourtant, celles-ci sont, lorsqu’elles sont systématiques, un mécanisme social féroce de répression. Par ailleurs, elles sabotent le débat. Lorsqu’à nos arguments éthiques on répond en nous traitant d’adorateurs de Bambi et par d’autres «arguments» auxquels même leurs auteurs ne croient pas, la contestation de l’ordre carnivore devient inaudible.

Notre emploi du terme «végéphobie» ne vise pas à escamoter le débat en «psychologisant» toute opposition à nos idées – en la faisant passer pour une pathologie mentale, une phobie. Ce ne serait pas de la végéphobie que de nous opposer avec sérieux de vrais arguments. Le débat de société sur la condition faite aux animaux doit avoir lieu. Nous demandons qu’il se déroule, sereinement, arguments contre arguments. Et que ceux qui ne veulent pas débattre se taisent.

David Olivier, militant progressiste engagé pour l’égalité animale et fondateur de la Veggie Pride.

»

Vlavvy 11 octobre 2017 - 17 h 05 min

Oh, je ne connaissais pas ce texte. Bravo.

À noter que sur le document actuel de l’INPES (http://inpes.santepubliquefrance.fr/CFESBases/catalogue/pdf/747.pdf), le paragraphe sur le végétalisme a disparu (https://image.slidesharecdn.com/guide-nutrition-pour-ados-1316263659-phpapp01-110917074849-phpapp01/95/guide-nutrition-pour-ados-11-728.jpg). Je me demande ce qui les a poussés à corriger. Ils auraient pu en profiter pour améliorer le reste.

Éliot 15 octobre 2017 - 15 h 49 min

 » Elle est d’abord fondée sur un refus d’entendre: d’entendre le cri du cochon qui a peur et qui ne veut pas mourir, d’entendre l’appel de la vache qui veut retrouver son veau. La végéphobie, elle, est le refus d’entendre les végétariens: le refus de tout débat réel sur la légitimité de la consommation de la viande. »

Wow. Comparer l’oppression subie par les animaux et la discrimination subie par les VGs, il fallait oser ! Bien sûr que le rejet subi par les VGs découle du spécisme, mais de là à vous inventer une oppression à vous et à comparer votre sort à celui des animaux il y a un pas quand, même, non ?

David Olivier 16 octobre 2017 - 11 h 19 min

Faire une comparaison entre deux choses, ce n’est pas dire que ces deux choses sont identiques.

Si je note qu’une femme qu’on siffle dans la rue, et une femme qu’on viole et qu’on égorge lors d’une guerre, ce sont deux exemples d’oppression sexiste, tu vas répondre «Wow. Il fallait oser!»? Parce que dans un de ces deux cas, l’atteinte est beaucoup plus grave que dans l’autre?

Un grain de sable c’est de la silice tout autant qu’un bloc d’une tonne de silice. Ce n’est pas compliqué à comprendre. L’oppression végéphobe est (généralement) bien moins violente que l’oppression subie par les non-humains dans les abattoirs. Et alors? Dans les deux cas, il s’agit bien de conséquences de la même oppression.

En fait, ce qu’il y a derrière tes propos, Eliot, et derrière les propos de toutes les personnes qui veulent faire polémique contre le concept de végéphobie, il y a l’idée d’une séparation de nature entre les humains et les autres animaux. Le spécisme, quoi.

xinecoll 11 octobre 2017 - 21 h 35 min

La vraie végéphobie, c’est une condition qui peut même affecter des vegans.
Enfant, j’avais une liste immense, en gros tout légume qui n’est pas un solanacée. En fait, ç j’étais même pas classée comme gamine difficile.
J’ai mis du temps à guérir, mais il me reste le fenouil et le genièvre. De taper les noms je me sens déjà mal. Il n’y a rien à faire. En plus, je suis tombée dans une famille de maniaques de la choucroute et du fenouil. Aucune empathie pour mon cas. On m’en mettait dans le biberon (le fenouil pas la choucroute). Pour eux, je plus décrédibilisée que Raquel Garrido parce que je mange de la choucroute (oui, sans le genièvre, là nuance, faudrait qu’elle les fasse v… aussi pour qu’ils perçoivent), et j’aime l’anis et la badiane (ils ont l’air de p

ElodieV 11 octobre 2017 - 22 h 30 min

Bien sûr, des jeunes qui se suicident car poussés à bout à cause de leur véganisme, c’est pas de la végéphobie…
Juste de la méchanceté anecdotique…

https://blog.l214.com/2017/04/20/emilie-rester-fort

https://www.thesun.co.uk/news/4574806/vegan-schoolboy-louie-tom-fenton-hanged-himself-bullies-threw-meat-at-him

Veggie Pride 11 octobre 2017 - 22 h 31 min

Bonjour Ophélie et merci pour cet article. Nous allons répondre au nom de la Veggie Pride. En effet, cette année nous avons eu de nombreuses critiques au sujet du terme « Pride » et de la « végéphobie ». Nous tenons tout d’abord à rappeler le contexte dans lequel est née la Veggie Pride il y a 17 ans, à savoir un contexte où le fait d’être végéta*ien-ne était beaucoup plus problématique qu’aujourd’hui et où il y avait une volonté de marquer la fierté de ne pas participer au massacre en appelant à la solidarité avec les victimes du spécisme.

Nous avons entendu les critiques qui nous ont été adressées (même si certaines auraient pu être moins virulentes et plus constructives…), et nous voulions préciser que le terme de végéphobie fait effectivement débat au sein de l’organisation, dans le sens où il ne s’agit pas d’une oppression systémique (nous sommes tout à fait d’accord là dessus), mais qu’il y a cependant encore des difficultés à devenir ou à se dire végéta*ien-ne dans notre société : dans ce à quoi nous sommes confrontés en tant qu’individu, nous avons les réactions des institutions et grands acteurs (cantines, médecins non formés…) et des individus (moqueries, rejet, agressivité…) C’est problématique car cela freine effectivement beaucoup de personnes dans leurs transitions et empêche un réel traitement du sujet dans la sphère publique. Et ceux qui trinquent sont les milliards d’individus non humains que l’on exploite et massacre.

Ceci étant dit, nous sommes loin d’être sourd-e-s à ces critiques et remarques, et nous avons donc entamé un débat en interne (puis avec d’autres associations) pour discuter de ces points, même si ce questionnement ne date pas d’hier. En effet, comme vous le soulignez, les choses évoluent, les problématiques changent, et il est important de prendre cela en compte pour faire évoluer le mouvement. Nous voulions cependant rappeler que les animaux et l’antispécisme ont toujours été au cœur de nos actions, et que nous avons depuis l’année dernière amorcé une ouverture sur la convergence des luttes, notamment en invitant des associations et intervenant-e-s pour traiter des liens entre féminisme et antispécisme, et nous souhaitons poursuivre ce travail avec d’autres actrice-eur-s. Par ailleurs, chacun est bienvenu pour discuter de ces problématiques avec le collectif, les réunions sont ouvertes et nous aussi.

Merci en tout cas pour votre point de vue construit, argumenté et bienveillant :).

L’équipe de la Veggie Pride

Antigone XXI 12 octobre 2017 - 12 h 06 min

Merci beaucoup à vous pour cette réponse pleine de justesse et d’ouverture.

J’imagine qu’il est difficile, alors qu’on a passé du temps à préparer un événement avec peu de moyens (mais beaucoup de bonne volonté !), de se prendre une rafale de critiques, certaines inutilement agressives et violentes. En tout cas, que les choses soient claires de mon côté, mon but n’était pas de critiquer ce travail et de condamner la Veggie Pride de but en blanc. J’ai bien vu le cheminement effectué ces dernières années, le dialogue avec les autres mouvements de justice sociale et le passage de la végéphobie au second plan, au profit de la lutte contre le spécisme. Je salue profondément ces initiatives et je pense que la VP est en passe de devenir un magnifique événement de lutte contre le spécisme et contre les autres oppressions sociales. Je pense qu’il n’est pas aisé non plus, lorsqu’on organise un événement, de changer à la fois son nom et ses raisons d’être, surtout quand ces changement font pas toujours l’unanimité en interne.

La VP a effectivement une histoire et est née dans un contexte où les termes de « pride » ou « végéphobie » n’étaient peut-être pas aussi problématiques qu’ils peuvent l’être maintenant. Je reconnais aussi tout à fait que se tourner vers le végétarisme ou le véganisme est certainement plus simple aujourd’hui qu’auparavant, mais ne reste pas évident en raison des pressions sociales (j’en ai fait moi-même l’expérience). Je pense qu’il est important de parler de ces difficultés, trop souvent occultées (de même que celles liées à la précarité, au manque d’accès et d’information ; quoi de plus frustrant de se voir toujours opposé des « Mais c’est si simple de devenir végane ! », « Le véganisme, c’est pas cher ! » ou « Ah bon, tu n’arrives pas à rester végane à l’extérieur ? » quand on fait part de ses difficultés). Il ne s’agit donc pas de faire taire ces ressentis, mais de les recontextualiser et de mieux les cerner afin de mieux y répondre.

Je n’ai pas de doute en tout cas que la Veggie Pride saura faire ce travail, avec intelligence, ouverture et bienveillance, comme le chemin qu’elle a déjà effectué ces dernières années et votre réponse le montrent une fois de plus. Merci à vous.

ig 11 octobre 2017 - 23 h 11 min

d’accord avec tout l’article, j’ajouterai juste (en plus) que le mouvement antispé a tout intérêt à vraiment écouter les militant.e.s féministes, LGBTQ et antiracistes, ainsi que les analyses des conditions matérielles et politiques de l’exploitation des animaux aujourd’hui (je m’exprime mal, il est tard, mais je veux parler du capitalisme, en gros). On ne peut pas en temps que végéta*ien.ne.s rester sourd.e.s aux problèmes que soulèvent la consommation de soja et de quinoa par les pays du Nord pour les populations des pays dont l’économie repose sur leur culture. Et aussi à écouter les analyses sur l’écologie et les impacts politiques du réchauffement climatique. Vraiment, il y a plein d’allié.e.s à se faire, et le problème est tellement global qu’on a besoin de tout le monde. Bonne soirée !

Clea 12 octobre 2017 - 0 h 36 min

Merci Antigone. Il n’y a rien à ajouter. J’avais très envie de lire un article pareil suite à la Veggie Pride et tu l’as fait <3

ElodieV 12 octobre 2017 - 3 h 33 min

Couple interdit d’adoption parce que végétarien : http://fr.vegephobia.info/index.php?post/2013/06/12/couple-interdit-d-adoption-car-vegetarien

Pas de garde pour un enfant VG : http://fr.vegephobia.info/index.php?post/2011/11/29/pas-de-garde-pour-un-enfant-vege

Discrimination à l’embauche : http://fr.vegephobia.info/index.php?post/2012/03/10/discrimination-a-l-embauche

« Il m’a mis violemment la tête dans l’assiette de façon à ce que mon visage soit en contact avec ce bout de cadavre… »
http://fr.vegephobia.info/index.php?post/2012/02/23/violence-a-table-pour-manger-de-la-viande

Et combien de personnes qui refoulent leurs convictions ?

Éliot 15 octobre 2017 - 17 h 56 min

Quelques anecdotes ne font pas une oppression. Il y a des anecdotes pour tout.

ElodieV 16 octobre 2017 - 0 h 51 min

Je suis d’accord mais ces faits sont loin d’être anecdotiques, hélas. De nombreux témoignages se recoupent. Ça serait bien qu’il y ait une étude sociologique sérieuse sur ce sujet. Il y aurait de quoi faire. Pour autant, pour les animaux notamment, il est important que les droits des végés soient garanties : droits de conscience : droit à pouvoir manger ce qu’on veut ; à pouvoir s’exprimer ; à avoir accès à une information adaptée et sérieuse etc. Actuellement, ils ne le sont pas à bien des égards. Pour que des droits soient garanties, il faut montrer les carences actuelles et pour cela, il faut des témoignages.

Une amie végane divorcée a élevé son enfant en lui donnant de la viande. À 10 ans, il ne souhait plus manger les animaux. Apprenant cela, le père a fait un procès à la mère. La mère a perdue la garde. Qu’une mère perde la garde de son enfant quand il n’y a pas de gros dangers, c’est rare. C’est pourtant arrivé. Le végétalisme a donc été considéré comme « un gros danger ». Aujourd’hui, l’enfant vit chez son père et mange de la viande.

Et on devrait laisser faire cela ? Ne pas nommer ce phénomène discriminatoire basée sur le végétarisme ?

Éliot 16 octobre 2017 - 9 h 46 min

Mais en fait tout ce qui est décrit là, ce n’est pas de la végéphobie. C’est du spécisme dont les conséquences retombent sur les allié.e.s, à savoir les VGs. Et bien sûr, le spécisme est un phénomène à étudier et à quantifier.
Défendre le droit à avoir un repas sans produits animaux équilibré dans les cantines, à stopper la désinformation gouvernementale qui est honteuse,ect, ce n’est pas lutter pour les droits des VGs. C’est lutter pour les droits des animaux, dont la consommation repose grandement sur la croyance qu’elle est indispensable à une bonne santé. On parle bien de spécisme (dont certaines conséquences retombent dramatiquement sur les humain.e.s) et pas de végéphobie.

Éliot 12 octobre 2017 - 11 h 11 min

Je tiens à te remercier, Antigone, pour cette prise de position tranchée. J’ai passé beaucoup de temps c’est derniers jours à essayer de faire comprendre le problème à des VGs, qu’une personne aussi connue de toi publie sur le sujet est un excellent soutien. Merci.

Esther 12 octobre 2017 - 11 h 16 min

Merci pour cet article qui me parle beaucoup.
J’avais déjà réfléchi à ce sujet et autant il me parait évident que le terme est à bannir étant donné la gêne qu’il peut occasionner chez de nombreuses personnes concernées, autant j’ai des questionnements pour lesquels je ne parviens pas à trancher.
Certes le vég*isme est un choix et en cela ça change tout. Certes dans la vie familiale, dans la rue les vég* ne courent aucun danger et ne sont agressés ni physiquement ni verbalement sur leur personne. Pour autant deux points me questionnent.
Le côté systémique des discriminations : ne parlons ici que de l’aspect santé. Il est aujourd’hui souvent impossible de se voir servir un repas équilibré dans les restaurations collectives et à fortiori dans les écoles, parfois il est même impossible de s’en voir servir un tout court et parfois les enfants n’auront pas le droit non plus d’apporter leur panier-repas. D’un autre côté les médecins sont mal informés sur les questions de santé des vég* et n’auront pas les bons conseils (jamais aucun ne m’a parlé de B12 !). Idem pour ce qui est des recommandations santé au national. Parfois même les médecins feront reposer un vrai problème de santé sur l’alimentation et mettront en danger la personne concernée en reculant le diagnostique.
Ce qui me fait arriver à ma seconde interrogation : peut-ont attribuer à cette défiance envers ces régimes alimentaire la cause des (rares) cas de décès de jeunes enfants ? Je le crois.
Je m’interroge d’ailleurs sans me sentir particulièrement concernée : j’ai les capacité mentales, le temps et les connaissances (études scientifiques) suffisantes pour m’informer et trier les informations que je collecte. Du coup on retombe sur de la mentaphobie et discrimination de classe (je pense aux personnes en situation précaire qui ont d’autres choses à faire que de se renseigner des heures durant sur leur alimentation).

Pour que ce soit clair : vous l’aurez compris, je ne suis concernée par aucune oppression dénommée « phobie ».

Matmout 12 octobre 2017 - 11 h 39 min

Hello,

Merci pour cet article intéressant.
J’ai quelques remarques cependant.
Je précise pour commencer que je n’utilise pas le terme de « végéphobie », et que si je devais donner un avis sur le sujet, ça serait plutôt contre (parce que du point de vue des non informés, ça fait en effet passer les vég*s pour les premières victimes). Mais aussi que je ne suis pas vraiment renseigné sur le débat en question, donc c’est juste un a priori.

Première remarque, je ne comprends pas vraiment l’argument du « choix ». Déjà, je pense que pour beaucoup de véganes, il est quasiment impensable de recommencer à manger des produits animaux ; le véganisme n’est donc plus totalement un choix. Mais même sans ça, en quoi le fait que ça soit un choix rendrait illégitime de dénoncer les pressions subies par ceux qui le font ? Non pas pour se victimiser, comme tu le dis, mais parce que ça participe indirectement à l’oppression des animaux, ne serait-ce qu’en poussant à « ramener dans le moule » les gens conformistes et très sensibles à la pression sociale, par exemple. C’est ce que j’ai cru comprendre des citations rapportés du livret (que je n’ai pas lu dans son ensemble).
Je ne pense pas qu’on peut nier qu’il existe une forme de pression sociale envers ceux qui font ce choix, qui est néfaste pour les animaux. Tu le dis bien toi même à la fin.

Deuxièmement, je suis peut-être naïf, mais je comprends vraiment pas pourquoi ça serait une « insulte » ou un refus de considérer les autres oppressions. OK, celles-ci peuvent mener à bien pire, et il faut s’y opposer également, mais si on ne doit pouvoir dénoncer que l’oppression « la pire de toutes », on est mal barrés, non ? Je pense que dans tous les cas ouvrir les yeux sur une oppression donnée rend plus sensible aux autres. C’est un peu la même galère pour tout le monde. Je ne vois pas en quoi il y aurait « concurrence » entre les causes. D’un point de vue tout à fait naïf encore une fois, je me dis que ceux qui s’insurgent contre l’utilisation de termes sur lesquels ils pensent avoir le monopole sont quelque part en train de dire « Eh oh ! C’est mon terme, ça ! Tu vas pas l’utiliser pour ta cause bidon, là ! C’est quand même vachement plus grave mon truc ! ». Ça ne mène à rien de bien.

Enfin, évidemment que nous ne sommes pas les animaux, qui sont les premières victimes. Mais je pense que ce que certains appellent la « végéphobie » participe grandement à leur oppression (ne serait-ce que les discriminations de médecins et compagnie dont tu parles à la fin). De mon point de vue, je vois pas ça comme une victimisation en tant que fin en soit ; mais si c’est utilisé comme tel, on est d’accord que c’est dommage.

Alors je suis très probablement un privilégié qui n’a pas conscience de tous ses privilèges (et qui ne s’intéresse pas vraiment à la différence entre une oppression systémique et une oppression « simple »), mais je vois vraiment pas ce que ça peut apporter dans la lutte contre les autres formes d’oppression de monter ainsi au créneau. Ça doit mener à des discussions stériles, qui d’un point de vue extérieur (i.e. du point de vue de ceux qu’on cherche à toucher), sont inaudibles. Encore une fois, c’est juste un avis, de quelqu’un qui n’a pas passé des heures à réfléchir au sujet, et si mes propos blessent certaines personnes, j’en suis désolé.

Enfin voilà, si jamais ça crée des débats sans fin et offense des gens, autant changer les termes, en effet (ne serait-ce que parce que tout le monde ne va pas pousser la réflexion jusqu’à passer outre sa répugnance initiale aux termes), mais dans le fond, je suis pas vraiment d’accord sur certains problèmes soulevés. Peut-être que ça changera après réflexion.

Signé : un « candide » pas vraiment au point sur le débat, qui va vite partir d’ici, parce que le sujet à l’air d’être sensible ! 😉

Éliot 12 octobre 2017 - 12 h 06 min

Il ne s’agit pas de hiérarchiser des causes, mais de réserver des termes politiques précis à des usages précis (j’en parle dans un commentaire plus haut).

Matmout 12 octobre 2017 - 16 h 18 min

C’est une réponse à mon commentaire ?
Si oui, j’ai lu l’échange avec Vlavvy, et je partage entièrement son point de vue, i.e. désaccord sur les critiques dans le fond, mais accord sur le fait qu’il serait mieux de changer de nom, si ça en froisse certains (tant que ça n’a pas d’impact négatif sur la cause qu’on défend ou d’autres causes).

Je reviens juste sur cette notion de « choix », qui semble être pour vous le cœur du problème, pour répéter que je ne vois pas de différence fondamentale dans les pressions qui peuvent en résulter (que certaines soient plus violentes, etc., c’est un autre sujet). Vous dîtes en gros que si ça nous convient pas, on peut remanger de la viande à tout moment. Mais n’est-pas là une marque de spécisme ? N’est-ce pas dire que parce que vous subissez une oppression pour quelque chose que vous n’avez pas choisi, on devrait s’estimer heureux de pouvoir de nouveau participer à celle que subissent les animaux ? J’ai vraiment du mal avec cette logique, qui m’apparaît comme un « chacun sa merde » (pardon si je me trompe). Et je maintiens que de mon point de vue, ça ressemble à une hiérarchisation (traduite par une volonté de s’approprier les termes, comme ça a été dit plus haut).

Et je ne vois vraiment pas en quoi la dénonciation d’une oppression devrait être limitée à ceux qui la subissent (sinon les animaux sont mal, d’ailleurs !). Certes les gens qui la subissent directement ont potentiellement davantage de légitimité à en parler (et encore, je pense que ça peut se discuter), mais on a pas besoin de s’être pris un poing dans la gueule pour se lever contre la violence, à ce que je sache. Et encore heureux.

Je pense qu’une partie du désaccord vient du fait que pour moi, c’est clair que l’utilisation du terme « végéphobie » par la Veggie Pride a pour but final de visibiliser la condition des animaux et de discuter le spécisme, alors que vous (je pense), vous voyez ça comme une façon de se faire passer pour une victime, alors qu’il y a bien pire.

Sur la réservation de termes politiques précis à des usages précis, j’ai peut-être un point de vue naïf sur la question, mais je pense que les gens en général (je parle des gens extérieurs aux différentes causes en question, ou peu renseignés, c’est-à-dire les gens qu’on espère toucher avec ce genre d’événement) s’en contrefichent du nom de tel ou tel événement, et ne vont pas être plus ouverts ou fermés à telle cause en raison du nom (tant qu’on est pas dans le cas d’un événement qui a un nom choquant pour le plus grand nombre). Pour la plupart, je pense que « Pride » représente juste une « fête » avec des revendications.

Donc oui, on peut changer le nom, si ça permet à des militants d’autres causes de se sentir plus concernés ou moins agressés (encore que je sois pas sûr que ceux qui s’insurgent le plus soient les plus ouverts ; mais je peux me tromper), mais de mon point de vue c’est un détail.

Et, dans un registre plus général, je pense que vouloir absolument que chaque antispéciste embrasse toutes les autres causes, bien que louable dans l’absolu, est contre-productif. Un(e) antispéciste raciste et un(e) féministe spéciste, c’est triste, mais c’est mieux que deux spécistes-racistes-sexistes. Tant mieux si certains luttent sur plusieurs fronts, c’est absolument louable. Mais on ne peut pas attendre que tout le monde en fasse autant. On ne peut pas établir un « portrait robot » du (de la) végane/féministe/etc. parfait(e), auquel il faudrait ressembler. C’est rédhibitoire pour beaucoup, et ça dénote selon moi une absence d’ouverture qui nuit aux mouvements. Les gens sont tous différents ; les véganes le seront donc tous lorsque le monde sera végane.

Bref, si le débat est vieux, j’imagine que ça a déjà été entendu maintes fois. Encore une fois, cette discussion n’a que peu d’intérêt pour faire avancer une quelconque cause, à mon avis (et pourtant j’ai encore écrit un pavé ^^).

Éliot 16 octobre 2017 - 8 h 49 min

« Vous dîtes en gros que si ça nous convient pas, on peut remanger de la viande à tout moment. Mais n’est-pas là une marque de spécisme ? ». Non, c’est une réalité. Si vivre un régime VG est trop difficile, peu importe la raison, le retour en arrière est possible. Oui, re-consommer des produits animaux, c’est spéciste, mais ce n’est pas spéciste envers les VGs, c’est spécistes envers les animaux. Je ne suis pas sûr de saisir votre argument.
« J’ai vraiment du mal avec cette logique, qui m’apparaît comme un “chacun sa merde” » Non plus. Il n’est pas question de hiérarchiser, de dire que c’est moins grave. Il est question de réserver les termes spécifiques à une culture minoritaire / mécanique oppressive à des situations dans lesquelles ils s’appliquent.
Si je devais théoriser le rejet et la discrimination vis à vis des VGs, je dirais qu’iels subissent par retour de flamme les conséquences de la pensée spéciste omniprésente et portée par la plupart des gens. Mais ça n’a rien à voir avec une oppression systémique séparée. Ce sont des victimes indirectes d’un système d’oppression, parce qu’iels prennent la défense des premiers concernés, les animaux.

« Je pense qu’une partie du désaccord vient du fait que pour moi, c’est clair que l’utilisation du terme “végéphobie” par la Veggie Pride a pour but final de visibiliser la condition des animaux et de discuter le spécisme, alors que vous (je pense), vous voyez ça comme une façon de se faire passer pour une victime, alors qu’il y a bien pire. » Vu ce que j’ai décrit au dessus, utiliser le terme de VGphobie est un non sens. Il met clairement l’accent sur la condition actuelle des VGs. Je ne pense pas qu’il soit pertinent pour visibiliser le sort des animaux, en plus d’être incorrect conceptuellement.

« Encore que je sois pas sûr que ceux qui s’insurgent le plus soient les plus ouverts ». Je peux vous tenir le même raisonnement à l’envers : je ne suis pas sûr que ce sont celleux qui se réapproprient le vocabulaire spécifique à une oppression sans écouter les concerné.e.s qui soient les plus ouvert.e.s.

« Chaque antispéciste embrasse toutes les autres causes, bien que louable dans l’absolu, est contre-productif. » Vous ne saisissez pas la notion de convergence des luttes. L’idée n’est pas de faire de chaun.e un.e militant.e parfait.e, luttant pour toutes les causes et réfléchissant à tout. C’est impossible. L’idée est de lutter, chacun.e avec sa spécialité, mais tou.te.s ensemble, en prenant en considération les autres. Et surtout, en laissant la parole aux concerné.e.s de chaque oppression, puisqu’iels en sont les meilleur.e.s spécialistes. je suis blanc, loin d’être expert sur la question du racisme. Mais je suis conscient d’être privilégié sur ce point. Quand je milite sur mes causes personnelles, je fais attention à ne pas récupérer abusivement des concepts provenant de cette lutte, à ne pas invisibiliser les personnes racisées. Quand un.e concerné.e me dit que j’ai écris/dit.fait quelque chose de raciste, je cherche à comprendre ce qui m’a échappé. C’est exactement cela qu’on reproche aux militant.e.s VGs : iels ne sont pas concerné.e.s mais tou.te.s des allié.e.s des concernés (les animaux, donc). Iels ne sont donc pas sensible à cette démarche, ce qui donne ce débat houleux auquel que je suis moi même en train d’alimenter actuellement. Écoutez les concerné.e.s. C’est la base. Comme le dit très bien Antigone XXI, tant que le mouvement VG restera dans son coin, cramponné à son fonctionnement, il ne permettra pas à ce pont de se crée (point qui existe entre les autres luttes) et à des militant.e.s aguerri.e.s de le rejoindre et de théoriser les liens entre spécisme et autres oppressions. Et c’est une grande perte pour tous les partis.

« Ca dénote selon moi une absence d’ouverture qui nuit aux mouvements. » Et bien non. C’est le refus de convergence qui ferme le mouvement vegan. Pas l’inverse.

Matmout 16 octobre 2017 - 10 h 54 min

Premier paragraphe : c’est une réalité, certes, mais une réalité spéciste (et pas envers les VGs, bien évidemment). Vous semblez dire qu’on a la chance de pouvoir échapper à cette situation délicate, en remangeant de la viande. Pour moi, ça montre bien l’absence de considération pour l’animal qui en pâtit. La souffrance des personnes humaines soumises à des oppressions systémiques serait plus importante que la violence que subissent les animaux que l’on consomme.

Deuxième paragraphe : d’autres vous ont déjà répondu mieux que moi sur votre volonté d’accaparer des termes, que je déplore.

Troisième paragraphe : on est presque entièrement d’accord, même si de mon côté, ayant un peu réfléchi maintenant, je trouve pas ça très pertinent de séparer ainsi les oppressions « systémiques » des autres, pour ce qui est de leurs conséquences dans la vraie vie (je ne doute pas que ça soit intéressant d’un point de vue philosophique ou pour décrypter les mécanismes sous-jacents et autre, en revanche).

Débat sur le terme « VGphobie » : déjà fait et refait sur cette page. D’autres se sont bien mieux exprimés que moi, je ne vois pas quoi rajouter si on est à ce point dans un dialogue de sourd. Je précise que j’ai lu vos interventions aussi, en essayant de ne pas avoir d’a priori, et que c’est plutôt celles de ceux en désaccord avec vous sur ce point qui m’ont convaincues.

Sur l’ouverture : Il n’y a pas d’appropriation (sauf de votre point de vue, comme vous tenez absolument à conserver votre mainmise sur le terme). Et je pense que les débats de cette page montrent bien que les gens en désaccord avec vous sont ouverts. On écoute, on argumente, et on se fait un avis. Être ouvert c’est ne pas rejeter sans raison une idée, ou se fermer complètement aux arguments divergents. Mais ce n’est en aucun cas accepter des arguments qui, après réflexion, ne tiennent selon nous pas la route. D’ailleurs après la citation de mon précédent commentaire que vous avez rapporté, il y avait « mais je peux me tromper ». Bref, de toutes façons c’était juste une remarque comme ça, c’est vrai que ça fait pas avancer grand chose et que j’aurais pu me retenir de la placer.

Paragraphe sur la convergence des luttes : merci (sincèrement), pour ces précisions sur un sujet que je ne connais pas beaucoup. Mais je ne suis toujours pas convaincu. J’ai vraiment beaucoup de mal à imaginer que l’utilisation du terme « végéphobie » invisibilise les victimes des autres oppressions. J’ai l’impression que les critiques virulentes de ce terme viennent surtout de personnes qui jugent leur cause plus importante, plus ou moins consciemment. Et je maintiens que faire attention à « ne pas empiéter sur les causes de l’autre », c’est en quelque sorte une façon de dire « chacun ses problèmes », qui bloque un peu l’avancée des différentes causes. C’est beaucoup mieux si chacun se sent directement concerné par toutes les formes d’oppression, sans se sentir obligé de se censurer s’il n’est pas directement concerné, non ? Sinon, on est vraiment mal : comment intéresser le mec blanc hétéro lambda, si c’est en lui disant « Bon, voilà les problèmes, donc tu assimiles tout ça, mais en tant que gros privilégié, tu fermes ta gueule ». Et je pense que si les animaux pouvait s’exprimer (puisque vous tenez à ce que les premiers concernés soient écoutés), bien évidemment qu’ils se soulèveraient de façon virulente contre la « végéphobie », puisque c’est un fait qui a des conséquences dramatiques sur leur condition. Mais bon, c’est plutôt pratique pour vous, il ne peuvent pas vraiment s’exprimer à ce sujet. Bref, je ne vois pas en quoi nous n’écoutons pas vos arguments (du moins moi et les quelques personnes en désaccord avec vous dans ces commentaires). Je les entends, et « je cherche à comprendre ce qui m’a échappé » (la preuve, je continue à discuter alors que j’ai l’impression que ça tourne en boucle dans un dialogue de sourd). Je ne suis juste pas d’accord. Donc dire qu’on ne les prend pas en compte, c’est juste malhonnête. Il y a une grosse nuance entre « ne pas vouloir écouter » et « écouter mais ne pas être d’accord ». Vous semblez tenir à ce qu’on se rattache à votre point de vue à tout prix. Ça vous regarde, mais franchement, ne venez pas dire qu’on ne vous écoute pas.

Enfin, je pense vraiment que, même sans s’être intéressé de près au sujet, la majorité des véganes partagent les idées de « convergence ». Je pense être opposé au sexisme et au racisme et compagnie (même si je ne milite pas pour ça, et qu’en tant que mec blanc hétéro, il est possible que parfois je les alimente inconsciemment, via des propos maladroits, ou des choses que j’ai enregistré depuis tout petit). Et je suis vraiment preneur de moyens de m’améliorer (bon, les « iels » et compagnie, je trouve ça un peu lourd à mettre en place, certes, même si dans l’idée je trouve ça très bien). Bref, tout ça pour dire que, comme c’est le cas de tous les véganes que je connais, je ne pense pas qu’il soit juste, et encore moins souhaitable, de se faire ainsi la guerre. On est pas ennemis, pas plus que les omnivores qui n’ont pas (encore) ouvert les yeux ne sont nos ennemis. Être ainsi dans une logique d’opposition, c’est juste triste et contre-productif.

Voilà. Je vais ajouter quelque chose, avec toute la bienveillance du monde, en espérant que ça ne soit pas mal pris. Vous semblez tenir absolument à ce qu’on se rattache à votre point de vue (il n’y a qu’à voir vos nombreux commentaires ici à la suite de ceux qui ne partagent pas votre avis). Manifestement ça ne fonctionnera pas, puisque les mêmes arguments reviennent sans cesse sans que personne ne semble rejoindre vos avis. Et de même, il semblerait que vous allez rester sur votre position. Donc faites vous une raison, et préservez votre énergie pour quelque chose de vraiment constructif. Si on est tous ici des gens motivés à rendre le monde meilleur, c’est quand même vraiment dommage qu’on perde notre énergie avec des gens convaincus ou quasi-convaincus, pour des choses qui n’ont que peu d’importance. Si jamais vous souhaitez répondre, je lirai avec attention, dans l’espoir d’élargir éventuellement mon point de vue, mais je ne répondrai pas.

Bonne journée.

Lumiciole 12 octobre 2017 - 12 h 50 min

Excellent article, merci d’avoir pris le temps de remettre les choses bien au clair sur le sujet. Pour ma part, végane, trans et pansexuel.le, ça me débecte tous les ans de voir passer les pubs pour la « Veggie pride » et d’assister à ce qu’il me semble être une montée de l’usage de « végéphobie » (sans parler du « coming out végane »).

Je ne peux pas me sentir en sécurité dans un groupe ou un mouvement qui refuse de voir le problème et qui continue à maintenir que c’est acceptable de nous voler notre vocabulaire de la sorte. Qu’on n’ait pas vu le problème parce qu’on n’est pas concerné.e c’est une chose, on peut toujours faire des erreurs et les corriger. Mais là c’est pas ce qui se passe avec cet évènement et avec une partie des gens qui parlent de végéphobie. Non seulement c’est déplacé comme vocabulaire, mais ça contribue carrément aux LGBTphobies puisque du coup, nous autres concerné.e.s sommes obligé.e.s de choisir entre rejoindre un groupe qui méprise nos combats ou de s’en voir exclu.e.s.

Et puis franchement, la comparaison est tellement improbable. Je suis végane de puis trois ans et ouais c’est chiant. Faut toujours prévoir, faut toujours se la fermer, faut faire semblant de trouver rigolo la trois millième blague sur « lol tu veux pas des saucisses, ah bah non mdr mdr », c’est le bazar pour voyager, pour toutes les invitations, au travail, à l’école, en famille… Mais ça n’a aucun rapport avec mon vécu sur mes autres oppressions. Être végane ne me fait pas craindre d’être harcelé.e à l’école ou d’être attaqué.e quelque part, être végane ne pollue pas mes relations sociales dans 100% des cas, je ne vais pas devoir demander à l’Etat ou à un médecin si j’ai le droit d’être végane ou non, des gens ne manifestent pas dans les rues pour dire que je suis contre-nature parce que je suis végane…

Faut pouvoir entendre ça quand même et arrêter de confondre le vécu des cibles et celui de celleux qui soutiennent.

Bref, c’est quelque chose qui me fait de la peine parce que je me retrouve moins dans les mouvements véganes et que ça me chiffonne de me sentir peu à peu mis à l’écart alors que ces gens sont censés partager un idéal pour les animaux que je soutiens aussi.

Des bisous à toi Antigone, je te souhaite une bonne journée. 🙂

David Olivier 16 octobre 2017 - 11 h 48 min

Bien que je sois très critique envers l’intersectionnalisme, je me permets d’en emprunter un concept: celui de privilège. Et tes propos, Lumiciole, dégoulinent du privilège des véganes bien dans leur peau, jeunes mais majeurs, pas trop malades, pas trop immigrés, qui savent se renseigner sur Internet et tout le reste.

Tu le parles que de «moi moi moi». Tu ne te vis pas l’oppression végéphobe, donc l’oppression végéphobe n’existe pas. Des myriades d’autres personnes la vivent, elles, jusqu’à parfois se suicider; et d’autres témoignages on les a évoqués. Mais tu peux écarter ça comme étant juste «ouais c’est chiant».

Et surtout, tu ne vis pas l’oppression des non-humains qui sont conduits à l’abattoir, à cause de la végéphobie massive de notre société, de nos institutions et de notre culture, qui dissuade tant de personnes de cesser de les manger. Ça, ça ne te touche pas; la végéphobie, selon toi, ça se limite à «ouais c’est chiant».

#veganmofo 2017 (jour 12) : mon tofu brouillé (+ végéphobie; dequessé?) – Végane-franglais 13 octobre 2017 - 0 h 58 min

[…] la recette, je vous conseille quand même un peu de lecture : ce très pertinent billet d’Ophélie Véron, chercheuse et militante. Ça parle d’opression systémique, du […]

Neeve 13 octobre 2017 - 22 h 49 min

Bonsoir, j’avoue être décontenancée par cet article. Pour sûr, je n’ai pas un raisonnement aussi poussé rhétoriquement parlant, avec un esprit qui va plutôt au cœur des choses. Donc le fond du problème c’est quoi au juste ? Si quelqu’un pour m’éclairer svp. Que le terme « Veggie Pride » n’est pas aussi légitime d’être utilisé par les militants -et non militants d’ailleurs, mais tout aussi concernés- de la cause animale c’est bien ça ? Sérieusement, se monter les uns contre les autres pour une appellation ? Et puis, si la végéphobie existe, il faut arrêter de se voiler la face. C’est un parcours du combattant bien souvent pour un végéta*ien/végane. Et même si parfois ça ne se voit pas, que c’est mental, qu’on est souvent impuissants face à cette violence envers les animaux. Et bien souvent, on tait au fond de nous. On accepte les sempiternelles remarques, les blagues à la con -désolée-, les non-dits qu’on ressent bien pourtant. Non mais vous voyez le monde dans lequel on vit ? Un monde spéciste, un monde qui ne fait plus aucune place aux autres êtres sentients… Et malgré tout cela, on bataille, on continue dans ce chemin, on résiste. Et le voilà ce fameux Pride qui fâche, mais prend tout son sens : car tout comme une autre cause souhaiterait voir son combat aboutir, nous aussi on veut continuer et marcher en ce sens !
Bien à vous

David Olivier 14 octobre 2017 - 0 h 10 min

Merci Neeve d’apporter ainsi un peu de réalité sur cette page surréaliste.

Éliot 15 octobre 2017 - 15 h 53 min

Oui, c’est vrai, moi aussi je trouve ça surréaliste ces personnes qui s’approprient des termes et refusent de comprendre que si les concerné.e.s réagissent avec autant de véhémence, c’est parce qu’il y a un réel motif d’indignation derrière.

Nicolas Servant 15 octobre 2017 - 21 h 15 min

Je peux très bien retourner ce que vous écrivez et ce sera tout aussi juste. Donc votre commentaire ne fait en rien avancer la chose, si ?

Oui, c’est vrai, moi aussi je trouve ça surréaliste ces personnes qui refusent aux autres l’usage des termes et refusent de comprendre que si les concerné.e.s par ce refus réagissent avec autant de véhémence, c’est parce qu’il y a un réel motif d’indignation derrière.

Éliot 15 octobre 2017 - 22 h 11 min

J’avoue qu’après avoir expliqué en long en large et en travers ce qui posait problème (sous un article qui expose lui même très bien en long en large et en travers le problème), je me suis permis une petite pique à l’égard de David Olivier qui brille pour son indécence.
Sinon, je ne suis pas d’accord avec votre retournement : les premier.e.s offensé.e.s, celleux qui ont créé les Marches des Fiertés, ce sont les queers. Pas les VGs. C’est donc bien plus logique de s’intéresser en premier lieu à lieu indignation à elleux, non ? Iels créent un nom, on leur prend, iels s’indignent du mésusage. Les emprunteur.euse.s, plutôt que d’écouter et de chercher à comprendre cette indignation, s’indignent à leur tour. Et maintenant les deux indignations deviennent égales ! C’est le comble.

Vlavvy 15 octobre 2017 - 22 h 07 min

Rappelons quand même que *nous* ne nous approprions rien du tout, et ne retirons rien à personne : c’est vous qui voulez nous retirer des termes dont vous vous considérez les propriétaires exclusifs. Pas l’inverse.

Éliot 15 octobre 2017 - 22 h 16 min

J’aime bien la manière dont vous retournez le truc pour vous poser en victime.

Même si la Veggie Pride n’empêche pas la Gay Pride de s’appeler Gay Pride, elle vide le mot et la manifestation de son sens. Même si l’usage du mot reste possible pour les queers,il s’affaiblit. C’est donc confisquer un outil, que vous le vouliez ou non.

Pour vous donner un exemple : les gens qui disent « je me suis senti.e violé.e » à tort et à travers. Je les reprends de manière systématiques. Ces personnes n’empêchent pas les victimes de viol d’utiliser le mot. Mais en l’associant à des situations moindres, iels le vide de son sens politique (et c’est irrespectueux vis à vis des victimes de viol).

Bee Eole 14 octobre 2017 - 1 h 14 min

Merci Antigone pour cet article qui m’a fait réfléchir. J’étais très dubitatif vis à vis de cette polémique (étant moi-même bi, trans, féministe..), maintenant je comprend mieux et je soutiendrai ce point de vue.

[TW viol, violences] Il me reste un problème sur lequel je n’ai pas trouvé d’articles explicatifs, donc si jamais tu as des pistes ça m’intéresse beaucoup : le refus d’employer le terme de viol pour les animaux que des humains pénètrent pourtant de force… par exemple pour les inséminations. Il me semble que ça correspond à l’acte, pourtant. Je ne crois pas que l’employer pour des personnes non humaines diminue de quelque façon que ce soit l’horreur et la gravité de l’acte lorsqu’il est perpétré contre des personnes humaines. Alors je ne comprend pas ce point de vue et je m’interroge. Il y a peut-être un argument que j’ai raté ?

En te remerciant pour toute ton œuvre au fil des années. 🙂

Vlavvy 14 octobre 2017 - 1 h 33 min

Au-delà de l’acte lui-même, ce qui rend surtout le viol terrible pour les victimes humaines, c’est le traumatisme qui s’ensuit, généralement à vie. Ce traumatisme ne semble pas avoir d’équivalent chez les animaux. De toutes les horreurs qu’ils subissent dans les élevages, l’insémination artificielle est probablement l’une des plus supportables.

Il y a d’autres comparaisons (par exemple avec l’esclavage ou la Shoah) qui choquent tout autant, mais qui sont bien plus justifiées (parce qu’il y a alors des éléments bien plus pertinents sur lesquels appuyer ces comparaisons). Ça ne veut pas dire qu’il est forcément bon de les utiliser d’un point de vue stratégique, mais elles ont le mérite d’être plus correctes d’un point de vue conceptuel.

Éliot 15 octobre 2017 - 15 h 42 min

Ces comparaisons ne sont pas pertinentes et dénoncées régulièrement par les concernées. Voici quelques articles qui traitent de cette question :

https://tpunchintersectionnel.wordpress.com/2015/11/09/dossier-de-la-comparaison-entre-elevage-et-esclavage-3/
https://tpunchintersectionnel.wordpress.com/2016/07/01/les-droits-des-animaux-sont-ils-une-question-feministe/

Vlavvy 17 octobre 2017 - 11 h 04 min

Concernant la Shoah, les concernés ont été les premiers à faire la comparaison (et la font encore).

Pour l’esclavage, on pourra voir la réponse de David Chauvet à ce genre d’objections ici : https://fr.scribd.com/document/358826448/Et-pourtant-ils-sont-nos-esclaves

(Pour être clair, je pense que dans 99 % des cas ce n’est pas une bonne idée d’avancer ces comparaisons, a fortiori dans un débat. Mais il n’est pas pour autant interdit d’y réfléchir. Tirer les leçons du passés, ça passe aussi par là. Je m’arrête ici sur ce sujet. ^^)

Bee Eole 15 octobre 2017 - 22 h 11 min

Merci, alors en effet je comprend parfaitement le problème par rapport à la Shoah, c’est pour cela que je n’en parle pas, je n’ai pas de questionnements là dessus.

Concernant le viol… Le fait que ce soit la moins pire des tortures que les animaux vivent en élevage ne me semble pas enlever en soi le fait que ce soit une torture, et qu’elle correspond à la définition d’un viol. Par ailleurs j’avoue avoir de sérieux doutes quant à notre capacité de démontrer qu’il n’y aurait pas de traumatisme par la suite. Mais si jamais vous avez un lien, un article, une étude là dessus, ça m’intéresse. Quand bien même il n’y en aurait pas, je ne crois pas que cela suffise pour retirer la qualification de viol – si des personnes humaines ne ressentent pas de traumatisme, ou pensent ne pas en ressentir, est-ce qu’on peut pour autant leur dire que ce n’était pas un viol ?

Merci pour votre réponse, dans tous les cas. 🙂

Un invincible été » Life Lately #74 15 octobre 2017 - 10 h 16 min

[…] semaine je vous propose de lire ce très bon article d’Ophélie Véron, qui critique l’utilisation du mot « végéphobie » : je suis tout à fait d’accord avec elle, calquer la répression anti-végétarienne sur les […]

David Olivier 16 octobre 2017 - 11 h 37 min

Puisqu’on parle ici d’intersectionnalisme, je recopie un post que j’ai fait sur Facebook (qui lui-même reprenait un autre post; désolé, pas le temps de faire un texte complet en ce moment).

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Sur l’intersectionnalisme…

Un gars m’a traité d’abominable réactionnaire, de «vieil homme cis blanc», «incarnant la totalité de ce qui est détestable chez un militant», parce que j’ai osé remettre en cause une théorie particulière, qu’on appelle intersectionnalisme. https://www.facebook.com/martinpage1975/posts/10155663919746390?comment_id=10155664398696390&comment_tracking=%7B%22tn%22%3A%22R2%22%7D

Je suis effectivement contre l’intersectionnalisme. Je suis donc contre les luttes antiracistes, antisexistes, pour les droits des LGBTI? Je me fiche de ces injustices? Je suis antispéciste point barre, n’ayant de compassion que pour les animaux non humains?

Que nenni.

J’ai exactement la même impression, en devant me justifier de cela, que si j’avais déclaré mon athéisme devant un parterre de chrétiens et devais alors leur prouver que non, je ne rejette pas la compassion. Pour les chrétiens, «rejeter le Christ» c’est rejeter la compassion, la «charité chrétienne», voire toute éthique; compassion = christianisme, un peu comme dans le langage courant «ruban adhésif = scotch». L’intersectionnalisme a réussi ce même tour de passe-passe.

Donc, pour être clair: je tiens le racisme pour une plaie, et pour importante la lutte contre cette plaie. Il en va de même du sexisme et de bien d’autres discriminations injustes, comme du capacitisme, sans parler des injustices économiques. Et par ailleurs, je pense qu’il existe des rapports importants et complexes entre ces discriminations, entre elles d’une part, et entre elles et le spécisme. Mais tout comme je ne crois pas en Jésus tout en défendant la compassion, et utilise du ruban adhésif mais pas forcément du scotch, je pense tout cela à propos de ces luttes tout en considérant l’intersectionnalisme comme une doctrine fausse, absurde, et hautement pernicieuse pour ces luttes elles-mêmes.

Ce préalable étant dit, je recopie ci-dessous la réponse que j’avais faite au gars en question. (Beaucoup de points que je note dans la liste ci-dessous mériteraient de bien plus longs développements, mais ce n’est pas le moment pour moi.)

«Réponse de l’abominable vieillard cisblanc au jeune Louis.

Je suis effectivement très critique envers l’intersectionnalité, le postmodernisme (pour ce que j’en connais), le gauchisme (c’est-à-dire d’une certaine vision marxiste du progressisme).

De fait, aujourd’hui, cette vision intersectionnelle semble avoir acquis une sorte d’hégémonie dans les mouvements contre le racisme, le sexisme, l’homophobie et diverses autres discriminations injustifiées. En soi, on ne peut pas reprocher à une pensée le succès qu’elle a eu, et donc je ne reproche pas à l’intersectionnalisme cette hégémonie de fait. Par contre, on peut reprocher à l’intersectionnalisme de vouloir faire croire que quiconque la critique s’oppose ipso facto à l’antiracisme, à l’antisexisme, etc. Ce n’est pas le cas. L’intersectionnalisme, c’est une vision particulière des luttes contre l’injustice, ce n’est pas a priori la seule possible, et s’opposer à l’intersectionnalisme, ce n’est pas s’opposer à l’antiracisme, à l’antisexisme, etc. C’est s’opposer à une théorie particulière, qui doit être défendue sur ses propres mérites, pas sur les mérites des luttes qu’elle prétend représenter.

Et quels sont les mérites de l’intersectionnalisme?

– Nous rendre conscients du fait qu’il y a diverses oppressions, et qu’une femme blanche peut être raciste et un homme noir sexiste? Bon, c’est là effectivement un apport positif. Je ne suis pas convaincu qu’on ne peut pas s’en rendre compte sans adhérer à l’intersectionnalisme.

– Isoler les luttes dans un identitarisme étanche, interdisant à toute personne «non concernée» de se sentir concerné, d’y réfléchir, de dire quoi que ce soit de non estampillé par les personnes «concernées» – ou plus exactement par les autoproclamés représentants de ces personnes.

– Inciter à envisager chaque lutte comme un terrain de lutte de pouvoir, pour acquérir justement le statut de porte-parole seul autorisé de ce groupe. Les membres du groupe qui pensent autrement sont vus comme des traîtres.

– Dissoudre le sentiment d’objectivité et de réalité dans une myriade de «récits» («narratives») d’autant plus exaltées qu’elles se fondent sur la subjectivité des seules victimes.

– Affirmer que tout ce qui va mal dans le monde est le résultat d’un «système» méchant, de quelque chose de calculé par quelque Grand Ordonnateur du Mal.

– Produire une attitude brutalité psychologique extrême envers toute personne souffrant, mais dont la souffrance ne rentre pas dans les cases autorisées («oppression systémique»); négationnisme féroce, harcèlement standardisé («tears», «cookies», …).

– Bannissement général de tout attachement à la liberté d’expression, privant par là même les luttes en question de leur meilleure arme, qui est qu’elles ont des arguments. Terrorisme envers les personnes cherchant à penser de façon indépendante, stérilisation massive de la pensée.

– Repli frileux sur la pureté personnelle (il faut être déconstruit, «safe»), au détriment de la volonté d’améliorer concrètement le monde.

– Entrave massive des luttes, par l’exigence envers chacun d’être d’emblée d’accord avec toutes les autres luttes (de la liste autorisée des vraies luttes).

– Propagation du mythe du grand soir, du Grand Changement qui, seul, sera à même de purifier la société du mal; négation, en attendant, de tout progrès réel, déclassé comme illusoire et bon à satisfaire les seuls gogos réformistes.

– Et j’en oublie.

Historiquement, l’intersectionnalisme hérite clairement du marxisme. On assiste au même phénomène d’hégémonie de la pensée marxiste dans tout ce qu’on nomme la «gauche» («les gauchistes» dont tu parles). Ses concepts particuliers et très discutables sont aujourd’hui vécus comme allant de soi: le concept de lutte des classes, de capitalisme, d’exploitation, etc., à tel point que si on les remet en cause, on passe pour quelqu’un qui nie l’injustice sociale et le besoin qu’il y a d’y porter remède. Là encore, c’est faux. L’approche marxiste n’est qu’une approche possible, et, à mon avis, elle est fondée sur des bases plus que douteuses.

Tu dis: «La présence d’influences aussi toxiques dans le mouvement est sans doute l’une des principales causes de son retard et va probablement contribuer à le maintenir isolé et marginal pendant encore longtemps parmi les mouvements sociaux.»

De fait, le mouvement animaliste se distingue peut-être effectivement par le fait que la vision intersectionnaliste n’y est pas dominante. Je pense que c’est heureux. Non, je ne souhaite pas que l’animalisme reste isolé. Je souhaite au contraire qu’il aide les autres mouvements à sortir de l’ornière intersectionnaliste, marxiste, identitariste. Je pense que l’animalisme a beaucoup à apporter au mouvement progressiste; que le progressisme doit se refonder, en fait, sur des bases largement issues de l’animalisme.»

Matmout 16 octobre 2017 - 12 h 09 min

Merci beaucoup pour ce commentaire.

De mon point de vue de néophyte (ce qui ne reste que le point de vue d’une personne, mais c’est déjà ça), j’en suis arrivé aux mêmes conclusions que les différents tirets ci-dessus. Je précise ça si jamais certains prônant l’intersectionnalisme sont ouverts aux critiques pour améliorer leur efficacité, indépendamment d’un « dogme ».

Comme quoi c’est toujours important de garder un esprit ouvert et critique, même après avoir lu un article qui sonne bien.

David Olivier 16 octobre 2017 - 13 h 12 min

🙂

Au-delà des points précis que j’ai noté, ce qui me semble le plus important est qu’on puisse critiquer l’intersectionnalisme, l’évaluer selon ses mérites, sans se faire insulter, ostraciser, traiter de raciste, etc. Actuellement, c’est difficile.

Vlavvy 16 octobre 2017 - 13 h 59 min

Je suis actuellement en train de lire le Que sais-je ? sur le véganisme, par Valéry Giroux et Renan Larue. Dans un des chapitres, les auteurs identifient quatre stratégies utilisées par les promoteurs du carnisme pour légitimer l’exploitation des animaux :
1. Affirmer la singularité ontologique de l’espèce humaine
2. Légitimer la violence carnivore
3. Ridiculiser les défenseurs des animaux (par exemple la pub d’Aoste avec les hippies végétariens qui se libèrent en mangeant du jambon)
4. Diaboliser les défenseurs des animaux (rapprochements avec le nazisme, menace pour le futur de l’humanité…)
En somme, une bonne partie des stratégies carnistes consiste à entretenir le discrédit des végés. Plus loin, l’ouvrage consacre une section à la végéphobie.
S’agit-il encore d’un délire de petits mecs (désolé Valéry) blancs cis et hétéros qui cherchent à s’inventer des oppressions ? Ou y a-t-il peut-être, éventuellement, quelque chose à creuser et à prendre en compte là-derrière ?

Vlavvy 16 octobre 2017 - 18 h 45 min

Le rapport original du Humane Research Council est ici : faunalytics.org/wp-content/uploads/2015/06/Faunalytics_Current-Former-Vegetarians_Full-Report.pdf
Les difficultés invoquées sont en premier lieu d’ordre social, avec notamment 63 % des ex-végétariens qui déclarent s’être sentis exclus à cause de leur régime.

Tany 16 octobre 2017 - 20 h 48 min

La veggie pride a toujours été antispéciste, pas besoin de leur tapoter sur la tête pour les féliciter d’éventuels progrès en la matière ; la vp était l’antispécisme en France et a même inspiré à l’étranger, faire passer cette manif historique avec des gens qui se bougeaient de loin pour demander une « justice pour les animaux » pour des pleurnichards réclamant des droits pour eux c’est irritant (les slogans, pancartes, ne réclamaient pas des droits pour les humains mais étaient 100% tournés vers les animaux, et il y avait la conscience d’être peu et chacun une voix importante pour les animaux, ça demandait du courage, ce n’était pas aussi confortable que se retrouver entre potes au milieu d’une large foule entre une gauffre et un tshirt, on s’exposait, mais c’était le moment où cette parole pouvait être livrée, criée, hurlée, dans une société qui ne la concevait pas et ce n’était pas rien). Tu devrais rechercher les manifestes.

Sara 17 octobre 2017 - 0 h 02 min

En 2005, l’organisation de la LGBT pride Paris avait invité la Veggie Pride à défiler dans son cortège…

Louise 17 octobre 2017 - 23 h 37 min

Précision : l’homosexualité en France a été dépénalisée en 1982. Et non en 1974.

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